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admise dans la viande et la plupart des organes des animaux, a été mise hors de doute dans le règne végétal. M. Payen en a trouvé d’abord dans les graines et dans les jeunes pousses ; plus tard il a pu affirmer que l’azote était non pas un accident, mais la règle générale. C’est même par la proportion d’azote contenue dans un fourrage ou une graine que sa valeur nutritive est déterminée, de sorte que cette substance, qui avait été nommée azote par Lavoisier pour indiquer qu’elle est impropre à la vie et dans laquelle en effet on ne pourrait vivre, est au fond l’indispensable agent de la vie.

Les quatre cinquièmes de l’atmosphère terrestre sont formés d’azote. La nature a donc mis auprès de nous la source de la vie, et les végétaux semblent devoir facilement y puiser. Autour de leur tige, de leurs fleurs et de leurs fruits se meuvent sans cesse des quantités énormes d’azote, qui, comme l’oxygène, semblent devoir être absorbées et assimilées par eux. La nature prévoyante a su réunir dans l’air les substances propres à les faire vivre, comme l’oxygène, par la respiration, et aussi à les faire exister avec une forme particulière. Malheureusement ceux qui aiment la simplicité sont souvent déçus lorsqu’ils étudient les phénomènes naturels et leurs causes. M. Boussingault a fait germer des graines (c’étaient, je crois, des haricots et de l’avoine) dans une atmosphère ne contenant que de l’azote, de l’oxygène et de l’acide carbonique, mais privée, ainsi que le sol, de toute combinaison azotée. Les plantes sont mal venues, et ne contenaient que l’azote renfermé dans la graine après trois mois de végétation. L’expérience a été cent fois refaite, et le résultat n’a point varié. Tout l’azote des végétaux serait-il donc fourni par le sol ou apporté par les engrais ? Et cependant les prairies et les forêts poussent sans cesse, donnent du bois, des glands, du foin, et le sol ne paraît pas s’épuiser ; bien plus, les terres défrichées sont les meilleures, quoique tous les ans la récolte enlève des quantités énormes d’azote. Ainsi sur 1 hectare de prairie on enlève tous les ans 15,000 kilogrammes de foin sec, c’est-à-dire 660 kilogrammes d’azote ; même le produit en azote d’une prairie qui ne reçoit aucun engrais azoté est beaucoup plus considérable que celui d’un champ de froment qui a été fumé. D’autres plantes, comme le lupin, viennent sur des terres qui renferment peu ou point de combinaisons azotées. Si, comme nous le verrons bientôt, on peut croire qu’une partie de l’azote des plantes vient du sol, il est clair qu’une partie au moins égale vient de l’atmosphère. Comment pourtant concilier ce résultat avec l’expérience que je citais tout à l’heure ? Il existe une combinaison d’hydrogène et d’azote bien connue sous le nom d’ammoniaque ; cette substance se produit toutes les fois qu’une matière azotée entre en décomposition, et dans les