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après les princes. Le même jour, il eut une seconde audience du roi, qui l’introduisit dans ses appartemens particuliers. Cette partie du palais est presque entièrement meublée à l’européenne. Tous les ornemens, parmi lesquels figurent des bustes de la reine Victoria et du prince Albert, de riches pendules, des baromètres, des thermomètres, etc., ont été apportés d’Angleterre. Quelques pièces renferment de belles collections de porcelaines de Chine. Le roi montra sa bibliothèque, composée de nombreux ouvrages anglais. Il discourut longuement sur l’histoire de Siam et sur les sciences de l’Europe ; il récita en latin et en anglais les noms des signes du zodiaque, et, pour prouver qu’il était au courant des plus récentes découvertes, il demanda des nouvelles de la planète Neptune. Malheureusement l’éducation siamoise reparaissait par momens à travers ce brillant vernis d’érudition européenne. Ainsi le roi annonça que l’audience solennelle aurait lieu un lundi, les astrologues de la cour ayant déclaré que ce serait un jour propice, et cela fut dit le plus sérieusement du monde. Sir John Bowring dut s’incliner devant le décret des astrologues, qu’il ne s’attendait pas à voir apparaître dans cette conversation scientifique ; mais en présence d’un tel argument pouvait-il se fier complètement aux bonnes dispositions du roi et de ses ministres ? Qu’arriverait-il s’il prenait fantaisie aux astrologues de faire parler les étoiles contre le traité, et d’éconduire la mission anglaise sur l’avis de la planète Neptune ? Sir John sentit involontairement sa confiance quelque peu ébranlée à la suite de cette seconde entrevue, pendant laquelle le roi, sauf une nouvelle insinuation sur l’affaire de la Cochinchine, évita soigneusement d’aborder la question du traité. Le plénipotentiaire anglais résolut donc d’insister plus énergiquement pour que les négociations officielles s’ouvrissent sans retard.

Enfin le 8 avril, le pkra-kalahom fit connaître que cinq plénipotentiaires siamois étaient nommés, que l’on procéderait immédiatement à la discussion du traité, que l’audience solennelle suivrait la signature de l’acte diplomatique, et que plus tard le roi enverrait une ambassade en Angleterre. C’étaient de bonnes nouvelles. Le ministre ajouta que l’on serait disposé à concéder les principaux points débattus dans les conférences officieuses qui s’étaient succédé depuis l’arrivé du Rattler, et que probablement tout pourrait être terminé en trois jours. Les plénipotentiaires désignés par les deux rois étaient : un prince royal, les deux somdetchcs, le phra-kalahom et le phra-klang. Le prince royal passait pour un homme très éclairé et partisan des Européens ; le premier ministre et le ministre des affaires étrangères avaient déjà donné la mesure de leurs dispositions libérales par l’empressement avec lequel ils avaient, dans les conférences officieuses, accueilli les ouvertures de l’ambassadeur