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des ébauches de grottes pareilles. Presque toujours, comme dans la grotte de Fingal ou plutôt dans les grottes de Fingal, car on en trouve plusieurs analogues, la masse basaltique a pivoté autour d’une ligne placée en arrière de l’ouverture de la grotte, qui se trouve ainsi moins élevée au fond que sur le devant. Ouvrez modérément la gueule d’un chien de chasse au long museau : ses dents (toujours très belles) en dessus et en dessous vous représenteront assez bien les tronçons séparés des colonnes basaltiques, tronçons formant le toit et le pavé de la grotte, tandis que ses deux crocs, atteignant les deux mâchoires, figureront les colonnes restées entières, et qui des deux côtés soutiennent la voûte formée par les tronçons soulevés des colonnes basaltiques partagées en deux.

La théorie des bois fossiles de l’Islande, telle que je la trouve exposée dans la relation du voyage de la Reine-Hortense, me paraît devoir être accueillie avec une pleine confiance, et comme d’ordinaire, une vérité en amène d’autres. Si l’on admet, par exemple, que ces bois ont été charriés par des courans marins, les diverses hauteurs où ces bois se trouvent seront un précieux indice des soulèvemens du sol. Il n’y a qu’aux îles Faeroë que la relation reste muette sur le soulèvement des rivages. Toutefois, quand une expédition a pris une bonne initiative, elle trouve des continuateurs, et par conséquent elle fait avancer la science par ce qu’elle fait faire comme par ce qu’elle a fait. Il ne manque à la physique du globe que des encouragemens convenables et des appréciateurs qui paient en renommée ce qu’on tente pour ses progrès. On a dit depuis longtemps : Il n’y a point de public pour les sciences. C’est vrai. Je crois qu’on en peut dire autant de la chaire et du barreau.

Scarron même l’emporte aujourd’hui sur Patru.

La France ne doit pas oublier, qu’elle est l’aréopage de la gloire. « Si je l’osais, dit Frédéric le Grand dans une lettre à Maupertuis du 12 mars 1750, je vous dirais confidemment (aujourd’hui confidentiellement), à vous Français, ce qu’Alexandre disait aux Athéniens : « Que j’entreprends de choses pénibles pour être loué de vous ! »

Il résulte de la relation nautique qu’on vient d’examiner que, si les glaces flottantes n’ont pas écrasé la Reine-Hortense, ce n’est pas la faute de la témérité des navigateurs, compensée à la vérité par la surveillance la plus active et la plus savante qu’on puisse imaginer. Le pauvre Saxon, bâtiment en fer qui portait un approvisionnement de charbon, ne s’en tira pas si bien : il fut crevé, sans s’en apercevoir, par un tout doucereux glaçon. Heureusement il ne périt pas tout à fait. Je suis fier d’avoir plus d’une fois témoigné, avant l’expédition, de la haute imprudence d’une pareille campagne le long