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nord de l’Atlantique. En effet, les pêcheurs des côtes de la Scandinavie, les baleiniers des mers qui séparent le Groënland de l’Amérique, et les expéditions qui vont à Terre-Neuve, suivent des routes tellement uniformes et se détournent si peu de la ligne qui les mène directement au lieu de leur exploitation, qu’on est surpris de voir combien sont incomplets les documens qu’on peut recueillir sur leurs fréquentes traversées. Ils font de l’argent et non de la science. Le champ reste donc libre aux explorateurs désintéressés, et l’on est étonné qu’une seule expédition française ou anglaise, voire un voyage de touriste intelligent, nous instruise plus que les nombreuses et périodiques émigrations et retours des marins de l’Europe commerciale.

Le voyage très court du prince Napoléon peut être mis en première ligne pour le nombre et l’importance des faits recueillis sur nos mers polaires. Claude disait que c’était être un sot que de ne pas naître roi. C’est au moins une grande maladresse à un explorateur que de n’être pas prince. Les grands observatoires astronomiques d’Angleterre parlent de la force travailleuse intellectuelle du personnel de ces établissemens, comme ils parleraient du travail d’une chute d’eau ou d’une machine à vapeur. En suivant cette idée, sauf respect pour la force morale, on doit concevoir ce qu’un chef intelligent lui-même, secondé par une élite de marins et de savans de toute espèce, aidé de tous les moyens qu’on peut souhaiter et commandant aux circonstances au lieu d’être obligé de s’y plier, devait en peu de temps moissonner de faits, d’observations, de dessins, de collections de tout genre, quand tout allait au-devant de ses désirs. Un immense volume de huit cents pages, où il n’y a rien de trop, contient à peine tout ce que la rapide excursion de l’été de 1856 a fourni aux explorateurs français. La partie archéologique, la partie descriptive, la partie politique et économique, malgré leur importance, ne sont pas du ressort de cette étude, qui se renfermera dans son titre. Si les auteurs de cette relation, déjà très volumineuse, y eussent ajouté un précis descriptif de la riche collection rapportée de ce voyage, et qui a été mise sous les yeux du public pendant plusieurs mois, je pense qu’on y aurait encore puisé de curieux documens sur ce qui avait été vu, et de précieux exemples pour les récoltes à faire soit par les observateurs de chaque localité, soit par les voyageurs futurs.

La publication que nous a value l’expédition de la Reine-Hortense dans les mers du Nord se divise en deux parties distinctes. D’abord une narration rapide suit vivement le voyage des mines de houille de l’Angleterre au pays des clans d’Écosse, puis à l’Islande, à l’île de Jean-Mayen, entre l’Islande et le Spitzberg, au Groënland, aux