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dans sa marche victorieuse, au moins en ce qui touche le Holstein. L’Allemagne intervenait, elle faisait occuper le pays par des troupes de la confédération germanique. Le gouvernement danois se trouvait dès-lors limité de toutes parts, ne pouvant accomplir les améliorations administratives ou les épurations nécessaires, et réduit à ne toucher à rien. Le souverain du Danemark usait d’ailleurs d’une indulgence extrême envers les personnes. Toutes les rigueurs se bornaient au bannissement de quelques-uns des chefs principaux du soulèvement. C’est ainsi que cette opposition, vaincue d’abord comme faction armée, puis amnistiée et demeurée en définitive maîtresse du terrain, se retrouve encore avec ses sentimens d’hostilité contre le Danemark, avec ses velléités insurrectionnelles, outre qu’elle se sert des avantages qu’elle a conservés pour intercepter les opinions et les vœux du reste de la population. Les membres de la diète d’Itzehoe invoquaient dans leurs paroles la modération et la conciliation. Il n’est pas moins vrai que le parti dominant dans le Holstein est occupé depuis plusieurs années à fomenter les passions de l’Allemagne contre le Danemark ; il a ses émissaires auprès des cours germaniques. Les chevaliers holsteinois sont en négociations permanentes avec Berlin et Vienne, et au dernier moment c’est derrière la Prusse et l’Autriche qu’ils s’abritent pour soutenir leurs prétentions, se refusant à toute transaction avec leur souverain.

Telle est cette opposition tenace et violente qui s’emploie si tristement à paralyser tout progrès constitutionnel et libéral, à entretenir de sourdes inquiétudes ou des passions de guerre civile dans les états de la monarchie danoise. Tout ce qui vient de Copenhague lui est suspect et est interprété d’une façon haineuse. Si le Danemark est obligé de faire acte d’autorité, on crie à la violence et on appelle l’intervention étrangère ; s’il offre des libertés plus grandes que celles qui existent dans la plupart des états allemands, on rejette ces offres, comme on vient de le voir, sous prétexte qu’elles ne sont pas sincères, et en réalité parce que l’opposition holsteinoise préfère la guerre ou l’incertitude à la paix, à un système plus libéral d’administration qui la rendrait impuissante. Et qu’arrive-t-il ? les autres parties de la monarchie danoise se lassent et s’irritent. Les populations du Jutland, nous l’avons dit, saisissent cette occasion pour entourer le roi à son passage, et lui offrir leur dévouement au cas où une insurrection éclaterait comme en 1848. D’un autre côté, dans le royaume, le parti qui pense avoir fait un grand sacrifice en renonçant à la constitution très libérale de 1849, pour se soumettre à la constitution commune de 1855, ce parti se remue de nouveau. De là cette pétition de l’association démocratique des paysans demandant le rétablissement du régime de 1849. Dans quelques jours, cette question va s’agiter dans les chambres de Copenhague. Effectivement, dès que le Holstein refuse de reconnaître la constitution de 1855, comment le parti qui, dans le royaume, ne l’a acceptée qu’avec peine, ne serait-il pas disposé à revenir sur ses concessions ? Et chacun se retranchant dans ses prétentions exclusives, où cela peut-il conduire, si ce n’est à un nouveau conflit ? Jusqu’ici il ne paraît y avoir eu encore aucune communication diplomatique décisive, soit de la part du Danemark, soit de la part des cours germaniques, à la suite des délibérations de la diète d’Itzehoe. Il est difficile cependant que