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passage des courans ne peut s’opérer, avons-nous vu, qu’à la condition que le fil de cuivre reste chargé d’une certaine quantité d’électricité qui tienne en équilibre celle qui se développe autour de l’enveloppe isolante en gutta-percha; en envoyant dans le fil une onde électrique négative après une onde positive, on pouvait espérer que les molécules, subitement déchargées et rendues à leur équilibre naturel, propageraient plus docilement l’excitation nouvelle. Les essais réussirent au-delà de toute espérance : en employant des courans dont le sens variait constamment, on parvint à produire à l’extrémité du câble huit mouvemens distincts du stylet dans une seconde; bien plus, les expériences entreprises avec les courans alternatifs démontrèrent que plusieurs ondes électriques positives ou négatives peuvent voyager en même temps dans le câble sans se détruire ou se contrarier mutuellement. On a donc le droit d’espérer qu’avec des dispositions convenables, on pourra un jour, sur les lignes sous-marines et peut-être même sur les lignes terrestres, envoyer à la fois des dépêches dans les deux sens avec un fil unique : résultat qui tiendrait vraiment du prodige.

Une fois qu’on eut reconnu que la transmission électrique pouvait s’opérer avec une suffisante vitesse, il fallait rechercher quels étaient les courans qui s’affaiblissent le moins dans un long trajet, parce qu’ils doivent conserver assez d’énergie pour faire mouvoir les appareils qui enregistrent les signaux. Les anciens instrumens nommés galvanomètres, qui sont destinés à mesurer l’intensité des courans électriques et se composent de fines aiguilles aimantées que le passage de l’électricité fait mouvoir, ne peuvent servir quand il s’agit de courans très forts et de très courte durée : les aiguilles s’agitent alors convulsivement et ne donnent plus aucune indication précise. M. Whitehouse a imaginé un instrument nouveau, aussi simple que rigoureux, qui mesure la force d’attraction exercée par un barreau de fer doux, changé momentanément en aimant pendant le passage du courant. Avec cet appareil, dont la sensibilité est exquise, M. Whitehouse a pu comparer les divers courans au point de vue de leurs propriétés télégraphiques : ceux qu’on devait préférer étaient les courans qui traversent le câble avec la plus grande rapidité, tout en perdant le moins possible de leur force. Sous ce double rapport, les courans qu’on nomme voltaïques, et qui sont dus à une action chimique, se distinguent très nettement des courans dits d’induction; ces derniers prennent naissance dans un fil conducteur toutes les fois qu’autour de lui l’équilibre électrique ou magnétique est modifié quand on approche un aimant, quand on l’éloigné, quand un courant voltaïque naît dans un fil voisin ou quand il s’évanouit, quand il gagne en force ou quand il s’affaiblit. Les courans d’induction ne sont donc en quelque sorte que les reflets des perturbations