goût très médiocre; mais dans la Rivière de Gênes, c’est un usage universel qui récrée la vue des passans. Le petit port de Chiavari n’a de curieux qu’une caserne fortifiée à l’ancienne mode, et une église neuve qui n’est pas finie. Le péristyle doit être orné de belles colonnes de marbre blanc; une seule est debout. Des fresques, qui tiennent moins de l’art que du métier, égaient l’intérieur, qui est vaste et lumineux; mais tout cela sent la mode et la nouveauté. En général, presque tous les édifices de ces petites villes du littoral, Rapallo, Recco, Nervi, ressemblent plutôt à des décorations qu’à des constructions sérieuses. Sur toute cette route, tout semble fait pour parler aux yeux; on dirait un art et presque une nature de théâtre, et il n’est pas jusqu’aux effets de lumière qui sont tellement violens et magiques, qu’on croit voir parfois réalisé quelqu’un de ces paysages invraisemblables, à reflets métalliques, avivés par les flammes colorées qu’allume à la fin des actes le machiniste dans les pièces à spectacle.
Tout le monde sait que Gênes s’élève en un amphithéâtre assez raide au fond d’un golfe ou plutôt d’une grande darse en demi-cercle que les constructions de la ville ceignent presque tout entière. On a lu partout la description des somptuosités de Gênes. Le port n’est bon à voir cependant que de la mer. De ses quais encombrés et mesquins, il n’offre guère que le spectacle d’une grande activité dans une grande saleté, car le bassin du port franc, où s’opèrent tous les débarquemens, ne vaut pas en grandeur et en bonne apparence le moindre des docks de la Tamise. Il est entouré et séparé de la ville par une galerie fermée, dont le toit en terrasse peut servir de promenade. Cette galerie cache toute vue au chemin de fer intérieur qui en suit le contour, à la rue qui longe le chemin de fer, enfin aux étages inférieurs des hautes maisons qui bordent la rue, en sorte que dans ces maisons, en apparence les mieux exposées de la ville, il faut monter à un étage assez élevé déjà pour voir la darse et l’horizon. Cette triple ligne, comme une enceinte convexe, clôt la ville du côté du sud, et ainsi l’on pourrait habiter Gênes sans se douter qu’on est dans un port. Pour le trouver, il faut savoir qu’il existe, et les rues perpendiculaires au quai sont rares et n’y aboutissent pas immédiatement. Au reste, tout le voisinage du port et une partie de ses établissemens sont, tantôt par le défaut d’espace, tantôt par le manque de soin, enfin par les nécessités du service, dans un état qui rend assez peu agréable de les visiter, tandis que la vue, prise soit de la mer, soit des collines ou des monumens qui dominent la ville, est digne de l’admiration témoignée par tous les voyageurs : c’est Marseille grandiose.
La ville proprement dite, la ville moins ses quartiers maritimes,