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est parfaitement inintelligible au point de vue de l’interprétation physique. Admettons qu’à force d’art et de patience on ait construit deux très longs barreaux, ayant leurs pôles bien isolés, également forts dans chaque aimant, et enfin aimantés juste à tel degré que l’un de ces pôles, agissant sur un pôle pareil à lui, à une distance d’un mètre par exemple, exerce sur lui une attraction ou une répulsion égale à un milligramme (notez bien que, dans l’expérience, on suppléera par un petit calcul à une très grande difficulté de construction). Voilà donc mon pôle bien défini en force, et, soit dans le XIXe siècle ou dans le XXe on pourra toujours reproduire ce même pôle avec cette même intensité. Cela étant fait, la mécanique nous offre par des oscillations le moyen de déterminer la force qui fait osciller le barreau, comme la pesanteur se mesure par les oscillations d’un pendule ordinaire. On fera donc de siècle en siècle la détermination précise de cette force magnétique du globe agissant sur un pôle ayant toujours la même quantité de magnétisme, et on aura ainsi la force absolue du magnétisme terrestre. Tel est le fond de la méthode tout à fait mathématique de Gauss. C’est, en dernière analyse, l’action d’un aimant sur un aimant donnant la force des pôles de ceux-ci, puis ensuite l’action de la terre sur ces pôles ainsi déterminés. Comme je me suis beaucoup occupé de cet objet, et que même la traduction du mémoire latin de Gauss, insérée dans les Annales de chimie et de physique, a été faite par moi, j’aurais du naturellement chercher à revenir des notions abstraites de l’auteur allemand aux notions physiques que je viens de développer tout à l’heure ; mais la complication mathématique m’a fait différer cette espèce de traduction de la métaphysique du calcul en expressions purement physiques. Voici par exemple comment on indiquerait, pour une époque donnée, la force magnétique du globe terrestre : Sur un pôle tel qu’à un mètre de distance il exerce sur un pôle pareil à lui-même une action égale au poids d’un milligramme, le globe terrestre exerce une action égale à un certain nombre de fois l’action du pôle pris pour type s’exerçant à un mètre de distance. Je n’ai pas besoin de dire que ces difficiles déterminations mécaniques ne sont pas de l’ordre de celles qu’on peut mettre sous les yeux des lecteurs de la Revue, car elles dépassent même la portée ordinaire des études mathématiques.

Dans l’état actuel de la science, nous ne pouvons pas prévoir si les deux pôles magnétiques, c’est-à-dire les deux points où concourent les méridiens magnétiques, feront le tour entier des pôles de la terre, ou s’ils ne feront que se balancer à droite et à gauche d’une position moyenne. Quant à l’équateur magnétique et à l’ensemble des lignes d’aimantation, il semble qu’ils se transportent d’un mou-