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M. Brück, savant belge, auteur d’un ouvrage très original intitulé Électricité, ou Magnétisme du globe terrestre, fait marcher de siècle en siècle ce pôle magnétique vers l’ouest. M. Duperrey est d’une opinion tout à fait contraire. On me reproche de n’avoir pas parlé du livre de M. Brück et de ne pas lui avoir rendu justice ; mais suis-je donc l’arbitre nécessaire de tous les travaux de géographie physique, théorique et pratique ? Ici, sans balancer, je plaiderai la cause d’incapacité.

M. Duperrey a tracé sur de belles cartes, non moins exactes pour la géographie proprement dite que pour la physique magnétique du globe, tous les méridiens magnétiques. Il a tracé de même des lignes courbes perpendiculaires à ces méridiens comme le sont nos parallèles géographiques aux méridiens ordinaires, et il a été conduit à cette belle loi, que, sur chaque parallèle magnétique, la force du magnétisme était la même partout, comme sur les parallèles géographiques la pesanteur est partout la même. Voyons donc ce que c’est que la force magnétique, dont le nom scientifique est intensité.

Imaginez un barreau aimanté horizontal suspendu à un fil métallique. Si vous tordez le fil qui supporte l’aimant, celui-ci cédera un peu et déviera de sa position naturelle. Il est évident que plus la terre fera effort pour le maintenir dans sa position primitive, plus il faudra tordre le fil pour l’écarter. Ainsi, tandis que pour le faire dévier de 10 degrés par exemple dans une localité, il faut tordre le fil de suspension de 100 degrés, il faudra le tordre de 200 degrés dans un lieu où la force de la terre sera deux fois plus grande. On pourra donc mesurer la force de la terre comparativement dans ces deux endroits, et, par une déduction dont je supprime le détail, on conclura de la force horizontale la force magnétique totale du globe. Or la loi de Duperrey consiste précisément en ce que les lignes perpendiculaires aux méridiens magnétiques, ou, si l’on veut, les parallèles magnétiques, sont sur la terre les lignes d’égale force ou d’égale intensité.

Me voilà, je pense, en position d’expliquer au lecteur curieux la variation diurne de l’aiguille. Qu’il veuille bien admettre avec M. Duperrey que les lignes d’égale intensité sont dirigées en chaque lieu perpendiculairement à l’aiguille aimantée, et réciproquement que l’aiguille aimantée se tient constamment à angle droit sur les lignes d’égale force. Voilà le soleil qui se lève et qui répand sur l’horizon oriental ses rayons calorifiques. À l’instant même, le magnétisme terrestre faiblit dans la région échauffée. Pour trouver les mêmes intensités qu’auparavant, il faut remonter vers le pôle. La ligne d’égale force se reporte donc un peu au nord, et par suite l’aiguille,