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truits en forme de colombiers, comme ceux de Parme et de Pise, et qui portent partout les signes d’une assez grande antiquité. Celui-ci, qu’on fait remonter au XIIe siècle, est orné de fresques un peu altérées. Au centre de celles du plafond en voûte, on reconnaît la tête du Sauveur, entourée des têtes des bienheureux rangées et serrées autour de lui en cercles concentriques. Cette disposition est d’une naïveté fort bizarre.

Mais la vraie cathédrale de Padoue, ce n’est pas le dôme, c’est l’église du Saint, il Santo, et ce saint par excellence est le thaumaturge le plus populaire qu’ait jamais, je crois, pris pour patron une ville importante. Saint Ambroise et saint Charles sont moins honorés que saint Antoine de Padoue, théologien portugais qui enseigna à Toulouse et à Padoue, et mourut dans cette dernière ville (1231). Il est vrai qu’il a passé pour faire trente miracles par jour, et la dévotion qu’il inspire est en proportion de la puissance qu’on lui attribue. L’église qui lui est dédiée fut construite au XIIIe siècle, peu après sa mort, par Nicolas de Pise, que les Padouans envoyèrent étudier à l’étranger les divers modèles de l’architecture ecclésiastique, et qui, sans s’abstenir de traiter beaucoup de parties de l’édifice dans le goût du gothique pointu, a voulu surtout imiter Sainte-Sophie de Constantinople. Cependant les huit coupoles d’un bel effet qui couronnent Saint-Antoine de Padoue ont été ajoutées au XVe siècle. La façade principale n’est pas ce qu’il y a de mieux, et l’œil en est facilement distrait par une énergique statue qui orne le milieu de la place : c’est celle du condottiere Gatta Melata, la seule statue équestre qu’ait faite le Donatello, et la première qui ait été fondue en Italie et par conséquent dans l’Europe moderne. Si l’on entre dans ce temple consacré à des reliques tenues par le vulgaire pour toutes puissantes, on ne songe plus qu’à en admirer la magnificence intérieure. La piété reconnaissante, la foi crédule, la libéralité du riche et du pauvre, le talent complaisant de San-Micheli, de Sansovino, de Falconetti, de Donatello, ont enrichi à l’envi ce grand trésor sacré, dont la description n’aurait point de terme.

Sous le rapport de la dévotion et de l’art, on trouverait encore plus à s’émerveiller dans une chapelle voisine qui porte le nom de scuola di Sant’-Antonio. Les scuole sont des oratoires fondés ordinairement par des associations particulières pour quelque œuvre de piété. Or celui-ci, qui appartient à la confrérie de Saint-Antoine, est tout un musée des principaux miracles du saint. Des fresques qui couvrent les murailles, quatre sont de Titien. La plus belle, et elle l’est beaucoup, représente un mari qui tue sa femme par jalousie. Désabusé et repentant, il obtint de saint Antoine qu’il la ressuscitât. Cette double scène est rendue d’une manière pathétique. J’en dis à