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études veut que nous allions tout de suite à la section minéralogique, laquelle occupe une suite de salles ouvertes en enfilade dans l’aile septentrionale du Muséum, appelée North-Gallery. Une partie de cette galerie est consacrée aux restes organiques. L’ordre dans lequel sont rangés ces fossiles exprime l’ordre des événemens relatifs à l’histoire de la terre, l’échelle géologique des temps. Le visiteur entre d’abord dans une salle dont les armoires latérales sont destinées à recevoir les vestiges de la flore primitive, surtout les plantes imprimées sur les feuillets de la formation houillère ; puis viennent les premiers animaux, les poissons, et bientôt l’attention s’arrête sur les monstrueuses formes des reptiles. Enveloppées dans leur robe de pierre, ces hydres, ces gorgones sont les apparitions les plus étranges et les plus terribles que l’œil humain puisse contempler : mâchoires énormes et hérissées de dents, affreux bâillemens fixés dans la roche, cous horriblement tendus, comme si ces animaux avaient été saisis et sculptés par l’art de la nature dans les convulsions d’une mort violente. Cette collection de reptiles, la plus riche qui existe au monde, occupe les salles III et IV. Passons, et une nouvelle classe d’animaux détruits, eux aussi, frappe maintenant nos regards : l’effrayant mégathérium, le massif mastodonte, le mammouth, tous les mammifères de l’ancien monde, et enfin, contre le mur qui termine cette galerie, le fameux homme fossile de la Guadeloupe[1].

Le Muséum of practical Geology est un grand et beau monument à deux faces, dont l’une regarde du côté de Piccadilly, et l’autre sur Jermyn-street. Le fondateur est Henri Thomas de La Bèche, né en 1796. Tout jeune il perdit son père, et résida pendant quelques années avec sa mère dans le Devonshire, d’abord à Charmouth, et ensuite à Lyme-Regis. Or dans le voisinage de Lyme-Regis se trouvent des carrières très importantes et riches en débris organiques. On peut rapporter à cette circonstance la nature de ses premières études, qui devinrent l’affaire de toute sa vie. Il est intéressant de voir avec quel amour il en revint toujours à ces roches de l’ouest de l’Angleterre, au milieu desquelles avait erré sa jeunesse. En 1810, Henri de La Bêche entra à l’école militaire de Great Marlow ; mais il n’embrassa point la profession des armes. En 1817, il s’enrôla dans la Société géologique de Londres, composée d’esprits d’élite dont il devint bientôt un des chefs. En 1835 commença l’enquête géologique du royaume-uni, entreprise par ordre du gouvernement.

  1. Ce squelette humain fut trouvé à la Guadeloupe, enveloppé dans une roche de calcaire solide. La roche et le squelette sont d’origine récente. On a calculé que cet homme fossile (sans doute un Caraïbe) pouvait avoir vécu vers le temps où Christophe Colomb se préparait à franchir l’Atlantique.