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mendicité ; les mesures adoptées pour l’empêcher, soit par l’autorité supérieure, soit par les conseils généraux et municipaux ; l’existence et l’organisation des établissemens de refuge ou de travail, des fondations civiles ou religieuses, des sociétés de bienfaisance et de secours mutuels ; enfin les interprétations peu concordantes que la jurisprudence en vigueur avait rencontrées dans les tribunaux et les cours. La conclusion du ministre était que l’administration n’entendait apporter dans cette recherche ni esprit de système ni opinion préconçue, mais que le problème, réduit à ses termes les plus simples, consistait à combiner dans une juste mesure la répression et la charité.

La question était bien posée : les réponses ne furent pas toutes à la même hauteur, les faits aussi furent lents avenir. Il y eut pourtant un certain nombre de dépôts ouverts entre 1840 et 1848, et de plus la jurisprudence fut enfin fixée. Ce qui partageait les tribunaux et les cours, c’était la nature de l’autorisation exigée pour l’établissement d’un dépôt. On vida le conflit en substituant aux arrêtés du ministre la sanction plus élevée d’une ordonnance ou d’un décret, et cette formalité fut exigée non-seulement pour les fondations publiques, mais aussi pour les fondations communales et particulières. Depuis lors, rien ne s’oppose plus, dans le domaine de la légalité, à ce que la mendicité disparaisse de la surface de notre territoire. Ce qui subsiste d’obstacles vient d’ailleurs et ne peut être surmonté aussi facilement. Renfermer un mendiant [surpris en flagrant délit n’est pas tout en effet : il faut lui assurer du travail dans la prison ou hors de la prison, combiner le secours et le châtiment, faire du malheureux délinquant, si c’est possible, un membre actif de la communauté, ou, si l’âge et les infirmités s’y opposent, lui ouvrir des asiles spéciaux comme destination définitive. Autrement il n’y a là qu’une douloureuse fiction. Le dépôt recevra et rendra les mêmes pauvres ; à peine libres, ils tendront la main pour y rentrer, et où l’on croyait n’avoir que des hôtes de passage, on aura des pensionnaires intermittens, triste témoignage de l’impuissance de la loi.

C’est à cette circonstance que l’on doit attribuer les progrès si lents de l’extinction de la mendicité. Sur l’ensemble de nos départemens, seize seulement se sont trouvés en mesure d’établir des dépôts ; il est vrai que, par une heureuse association, ces seize dépôts embrassent vingt-cinq départemens. Un grave inconvénient s’attache d’ailleurs à ces organisations partielles, c’est l’émigration de la mendicité. Chassés d’un départementales mendians passent dans le département voisin et l’infestent outre mesure, de sorte qu’à un mal guéri sur un point succède sur un autre point un mal plus grand. Il n’y aurait à cela qu’un remède, ce serait de proclamer l’uniformité du régime créé par le décret de 1808 et de rendre le dépôt obligatoire. Obligatoire ! mais les ressources de beaucoup de départemens