Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 11.djvu/312

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au moyen de la vente des biens des hôpitaux, des fondations et des dotations existantes. Chaque département devait recevoir à cet effet une somme déterminée, et un registre des indigens, ouvert au chef-lieu des cantons, devait servir de base aux répartitions. L’assistance privée était également soumise à quelques règles. Plus de dons manuels ni directs, mais des souscriptions volontaires versées dans une caisse de secours. En même temps des peines rigoureuses étaient édictées contre les mendians, avec la transportation comme sanction extrême. On alla, dans des décrets postérieurs, jusqu’à donner une assiette à l’indigence, en la mesurant à l’échelle des contributions, et une limite aux secours, en les fixant à 160 livres dans certains cas, et à 120 livres dans d’autres. Il est presque inutile d’ajouter que ces lois, votées avec apparat et accompagnées de discussions pompeuses, restèrent sans effet. On n’y avait oublié qu’une chose, c’était d’en mettre les dispositions en harmonie avec les ressources du trésor. Là comme ailleurs, l’argent manqua, et les pauvres en revinrent à leurs procédés habituels, en dépit d’interdictions dérisoires. Deux institutions survécurent seules à cette suite de décrets : le secours à domicile et le dépôt de mendicité.

Ce fut sur ce dernier moyen que revint et s’appuya la législation charitable de l’empire. Un décret daté de Bayonne du 5 juillet 1808 eut pour objet d’organiser des dépôts de mendicité, dont les dépenses devaient être supportées concurremment par le trésor public, les départemens et les villes. À l’appui et comme force coactive, on modifia le code pénal en y ajoutant les articles qui y figurent du numéro 274 au numéro 282 contre le vagabondage et la mendicité. Il s’agissait d’une extirpation complète obtenue à l’aide d’une répression vigoureuse ; mais là encore l’instrument n’était pas en rapport avec la tâche. Tout ce que put faire le gouvernement impérial au moyen de la force dont il disposait, ce fut d’ouvrir trente-sept dépôts, dont l’encombrement dépassa toutes les prévisions et amena des embarras de plus d’un genre. L’expérience était donc incomplète quand la restauration survint, et, sous la pression du clergé, laissa les choses aller de nouveau à l’abandon. Il ne se créa plus de dépôts ; beaucoup se fermèrent, un petit nombre seulement traversa cette période de défaveur. Cependant la réaction n’alla pas jusqu’à une abrogation formelle du décret de 1808, et le gouvernement de juillet put reprendre, avec la mesure et la prudence qui le caractérisaient, l’œuvre un peu négligée de l’empire. C’est à M. le comte Duchâtel que revient l’honneur d’avoir remis cette question à l’étude. Les départemens y procédaient au hasard, sans unité, sans esprit de suite. Par une circulaire en date du 24 février 1840, le ministre de l’intérieur ouvrit une grande enquête et indiqua aux préfets les points sur lesquels elle devait porter : les causes habituelles de la