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la réaction qui s’ensuit jusqu’au jour où David et les siens s’insurgent à leur tour contre les représentans d’une méthode surannée, — tout est décrit et jugé avec une autorité qu’il faudrait accepter sans réplique, si quelques propositions imprudentes, quelques aperçus un peu plus neufs que de raison ne venaient ça et là déconcerter la sympathie. Sans doute, en pareille matière, une certaine partialité patriotique ne messied pas, et, pour combattre notre vieille insouciance ou les préjugés du dehors, il peut être permis de célébrer un peu bruyamment les gloires qui nous appartiennent. Est-ce toutefois une excuse suffisante à l’injustice envers des gloires plus hautes encore ? On noterait dans le travail de M. Dussieux quelques passages où le soin de venger tel artiste français mal apprécié ou tout à fait méconnu distrait l’écrivain de son équité et de son érudition habituelles, témoin ce mot sur les œuvres de Jean Fouquet, qui, si habile peintre qu’il fût, ne méritait point qu’on lui sacrifiât sans plus de façons fra Angelico, Masaccio et toute l’école florentine du XVe siècle : « En n’étudiant que les miniatures des antiquités de Josèphe, on peut affirmer que l’Italie a ce moment ne faisait rien de plus beau. » Dire ailleurs que dans le Salon d’Apollon, peint par Lafosse, « tout est excellent, » qualifier « d’illustres » les architectes Robert de Cotte et Boffrand, enfin reconnaître à Watteau le privilège de « la plus merveilleuse couleur, » tout comme s’il s’agissait de Corrége, — c’est prodiguer au talent les hommages qu’il faut réserver au génie, et jusqu’à un certain point compromettre la cause que l’on défend. Non, en réclamant pour les peintres, les architectes et les sculpteurs de notre pays la place qui leur est due, n’essayons pas de déposséder les maîtres légitimes. Laissons les grands artistes italiens, ces premièrs artistes du monde, dans le panthéon où ils sont entrés à bon droit. Notre part sera assez belle encore, et si les portes du temple ne doivent s’ouvrir qu’à un petit nombre des nôtres, nous les retrouverons du moins en foule s’échelonnant sur les degrés. L’ouvrage de M. Dussieux est bien fait d’ailleurs pour nous rappeler nos droits et nos titres véritables : sauf ces quelques exagérations dans la louange, il ne contient rien que de très exact au double point de vue de l’histoire et de la critique. C’est une esquisse finement tracée des variations de l’école française et des révolutions qu’elle a suscitées à l’extérieur, c’est surtout un inventaire authentique de nos richesses, un relevé consciencieux des œuvres qui à toutes les époques ont honoré l’art de notre pays. Parmi les livres écrits sur des sujets de cet ordre, il n’en est guère de plus propre à nous renseigner utilement.



HENRI DELABORDE.


Traité des Entreprises de Culture améliorante, par M. ÉDOUARD LECOUTEUX.[1].

J’aurais mieux aimé que ce livre fût intitulé : Traité des entreprises de grande culture ; tel est en effet son véritable objet. M. Édouard Lecouteux, ancien directeur des cultures à l’Institut national agronomique, a une prédilection marquée pour la grande culture ; il lui doit tous ses succès et lui a voué toutes ses facultés. Je suis loin de m’en plaindre, bien au contraire.

  1. 1 vol. in-8o, Paris, à la librairie agricole, rue Jacob, 26, et chez Guillaumin.