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JOHN WILMOT
COMTE DE ROCHESTER

I.
UN SATIRIQUE A LA COUR DE CHARLES II.

« Les muses qui inspiraient Rochester ne l’avouent pas sans rougir. »
(HORACE WALPOLE.)


En 1657, trois années avant la restauration des Stuarts et Cromwell se mourant déjà, les habitans de la petite ville de Spilsby, comté d’Oxford, virent avec quelque surprise un char funèbre traverser inopinément leur cité. Aucune pompe, aucune escorte, point de flambeaux, point de draperies aux larmes d’argent ; à peine avait-on permis que des armoiries bien connues dans le pays décorassent le cercueil, que deux chevaux noirs traînaient vers l’église. Un messager du parlement, chargé de veiller à l’exécution du bill en vertu duquel les obsèques avaient lieu avec cette simplicité inusitée, précédait, en grand deuil et armé de la petite verge noire, insigne redouté du pouvoir que sa mission lui conférait, le char solitaire. Dans la chapelle, interdite au public, une femme, un enfant, quelques serviteurs l’attendaient au pied d’un autel où un ministre, revêtu de son costume ordinaire, s’apprêtait à officier. Les prières d’usage furent récitées sans musique, sans cérémonies d’aucune sorte, comme s’il se fût agi du plus simple bourgeois de l’humble petite ville, après quoi la bière fut déposée dans le caveau de famille, et chacun se retira. Le messager ne partit qu’après le dernier des