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anti-- Le ministre de la justice se sentait-il mal à l’aise ? Était-il blessé d’avoir vu la chambre repousser une clause de la loi qui était relative aux subsides des écoles séparées, et qu’il considérait comme une compensation du système des écoles mixtes ? Toujours est-il que M. van der Brugghen offrait sa démission au roi, et à sa suite le ministre de l’intérieur, M. van Rappard, qui avait montré un grand esprit de conciliation dans les derniers débats de la seconde chambre, demandait également à se retirer. Le ministre de la guerre lui-même enfin, le baron Forstner de Dambenoy, a paru un moment songer à quitter le pouvoir. Il restait à savoir si le roi accepterait ces démissions. Il paraît aujourd’hui qu’il n’en est rien. Des démarches ont été faites, dit-on, auprès de plusieurs anciens ministres pour les engager à rentrer dans le gouvernement. Ces tentatives n’ont point réussi, et alors le roi a refusé d’accepter les démissions des ministres actuels. Ainsi a fini cette crise, peu grave d’ailleurs, et aujourd’hui le cabinet pourra se présenter à la première chambre des états-généraux pour discuter la loi de l’instruction primaire avec la double sanction de l’approbation royale et du vote de la seconde chambre. Quant à l’adoption de la loi par la première chambre, elle ne paraît pas douteuse. La situation se trouvera donc un peu éclaircie. Le gouvernement et les chambres seront délivrés d’une affaire difficile, et les questions d’un intérêt pratique, positif, reprendront la première place. De ce nombre est surtout le plan de réforme de l’impôt, présenté il y a quelques mois par le ministre des finances, et tendant à établir une distribution plus équitable entre les contributions frappant les grandes communes et les campagnes.

Un autre projet vient d’être présenté aux états-généraux par le ministre des colonies, M. Myer : c’est le plan d’émancipation des esclaves à Surinam. Le nombre de ces esclaves est de trente ou quarante mille. Le projet ministériel est à peu près conforme aux conclusions de la commission spéciale qui a été chargée d’examiner la question dans ces dernières années, et qui voulait établir des communes d’esclaves libérés, sous la surveillance du gouvernement, en faisant racheter les esclaves par leur propre travail. Ce projet rencontre déjà des critiques qui le représentent comme un atermoiement nouveau dans l’émancipation, et vont jusqu’à élever des doutes sur les conditions de l’indemnité accordée aux propriétaires. C’est une question aujourd’hui livrée à la discussion.

CH. DE MAZADE.



ESSAIS ET NOTICES
Marco Bordogni.

L’histoire des chanteurs célèbres a toujours été un sujet fort délicat à traiter. Tout manque à la critique pour poser les bases d’un jugement équitable, qui puisse être facilement contrôlé par l’opinion des lecteurs. Non-seulement on a beaucoup de peine à recueillir les élémens certains d’une biographie raisonnable, qui ne se transforme pas en une ridicule apothéose ; mais l’appréciation du talent particulier de chacun de ces êtres maladifs qu’on nomme des virtuoses est une tâche encore plus difficile à remplir. Que reste-t-il dans