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ait point lutte, et que l’une ou l’autre ne finisse pas par l’emporter. Or, comme le ministre, des finances, M. d’Avila, passe pour l’homme capable du cabinet, il n’est point impossible qu’il n’y ait quelque autre évolution favorable à la politique qu’il représente. C’est une éventualité souhaitée par les uns, combattue d’avance par les autres. Au fond, rien ne peut mieux prouver l’état de désorganisation où sont tombés aujourd’hui les partis portugais. Cette décomposition fait la faiblesse des partis en même temps qu’elle fait la force de l’autorité royale, qui a retrouvé tout son empire, et vers laquelle se tournent toutes les opinions. Malgré sa jeunesse et une certaine timidité naturelle, le roi dom Pedro a montré, dit-on, à travers toutes ces complications, une maturité et une circonspection singulières ; il est d’ailleurs aimé des Portugais. Tout indique donc que, même sans sortir des règles constitutionnelles, il peut être conduit à prendre une prépondérance utile dans la direction des affaires du pays.

Les alliances des princes semblent prendre aujourd’hui une place particulière dans la politique. Le roi de Portugal va se marier avec une princesse de Hohenzollern. Ces jours derniers, la princesse Charlotte, fille du roi Léopold de Belgique, petite-fille de la reine Marie-Amélie, vient d’épouser l’archiduc Maximilien, et les fêtes de ce mariage ont été célébrées à Bruxelles avec un entraînement où l’on peut surprendre, de la part du peuple belge, comme une fierté secrète de voir sa jeune maison royale, unie par un double lien à la vieille maison d’Autriche. Enfin la reine de Hollande fait en ce moment un voyage à Londres, et cette excursion elle-même ne serait point étrangère à un projet de mariage entre le prince royal des Pays-Bas et une princesse d’Angleterre. C’est là ce qui se dit à La Haye, sans que ce projet présumé soit du reste l’unique préoccupation des Hollandais. La question la plus grave, la plus actuelle pour la Hollande, c’est toujours la loi sur l’instruction primaire, qui, après une discussion des plus sérieuses, vient enfin d’être adoptée dans la seconde chambre par une majorité considérable. La minorité s’est composée des votes des sept députés de l’opinion dite anti-révolutionnaire et de quelques voix catholiques. Au milieu des opinions diverses qui se sont produites sur les écoles séparées, sur le degré de liberté de l’enseignement, sur les conditions de capacité imposées aux instituteurs particuliers, le gouvernement, comme on sait, a cherché à se placer sur un terrain de conciliation où les divers partis ont fini par se rencontrer, et comme en définitive il y a un délai de cinq ans pour l’application des principales dispositions de la loi, toutes les opinions pourront vérifier dans l’exécution pratique l’efficacité des mesures adoptées dans un esprit de transaction. Ce n’est pas tout cependant : cette question de l’instruction primaire, qui a été depuis plusieurs années une cause d’agitation en Hollande, qui a suscité de si vives et de si longues discussions, cette question a eu pour effet de déterminer au dernier moment un incident inattendu. Le chef du parti anti-révolutionnaire, M. Groen van Prinsterer, a donné sa démission de député en la fondant sur l’adoption de la loi, et, par une conséquence plus inattendue encore, cet incident lui-même a peut-être contribué à mettre en question l’existence du ministère. M. Groen van Prinsterer en effet avait dirigé ses principales attaques, dans la discussion, contre le ministre de la justice, M. van der Brugghen, qui avait professé jusque-là les opinions du parti anti-