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catholique qui non-seulement ne comprend pas la nouvelle situation de l’église et ne se prête pas à l’œuvre de sa transformation, mais qui la pousse dans les voies de la réaction et ne veut pour elle point d’autre avenir que le retour plus ou moins complet vers le passé. Je n’ai pas besoin de reproduire ici les actes, les documens, les paroles, par lesquels cette portion des catholiques belges a plus d’une fois manifesté ses sentimens et ses tendances ; tout le monde en Belgique les connaît, et hors de Belgique, ceux qui ne les connaissent pas d’une façon précise les imagineront aisément. Personne, j’en suis sûr, ne juge plus sévèrement que moi les idées, ne déplore plus profondément que moi l’influence, en Belgique comme ailleurs, de cette fraction de parti. Je ne dirai pas, comme on l’a dit souvent à propos de notre propre révolution, que c’est surtout à l’obstination et aux prétentions de l’un des extrêmes qu’il faut imputer les lamentables excès de l’extrême contraire. Ce sont là de menteurs et misérables emportemens de la polémique des partis. À chacun ses œuvres et la responsabilité de ses œuvres. Quand l’esprit de licence, d’impiété et d’anarchie ne rencontrerait pas sur son chemin l’esprit de résistance égoïste et aveugle, il n’en pousserait pas moins les peuples jusqu’à l’abîme. Ce qui est vrai, c’est qu’après les grandes révolutions, quand la société fatiguée demande à se rasseoir et à s’établir régulièrement dans l’état nouveau que lui ont préparé ces crises terribles, alors surtout les entêtemens et les tentatives de l’esprit rétrograde deviennent funestes : il attaque sans pouvoir triompher, il menace sans oser frapper, il injurie sans savoir réformer. Non-seulement il évoque l’esprit révolutionnaire, non-seulement l’impiété cynique ou hypocrite ressuscite à l’aspect du fanatisme persécuteur ; mais, ce qui est encore plus grave, le travail de régénération morale et politique, auquel le public se prêtait volontiers, est tout à coup suspendu ; les mauvaises passions se réveillent jusque dans les cœurs tranquilles ; les méfiances haineuses rentrent dans les esprits incertains ; les masses s’irritent, les honnêtes gens s’inquiètent ; la société, qui marchait vers le bien, s’arrête avec doute, tentée d’accepter de toutes mains des défenseurs contre le vieux fantôme qui ne la comprend pas, ne l’aime pas, et prétend la ressaisir.

Que ces appréhensions suscitées par les fautes d’une partie des catholiques aient été l’une des causes des tristes scènes dont la Belgique vient d’être le théâtre, je tiens cela pour certain. Les émeutes qui ont brutalement violé et suspendu la liberté constitutionnelle des représentans du pays n’avaient probablement en elles-mêmes que peu de force, et auraient pu être aisément réprimées, si, à côté de leur explosion, ne s’était laissé entrevoir l’adhésion inactive, mais réelle, d’une portion considérable de la bourgeoisie belge. C’est là