Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 10.djvu/345

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’empire, s’étaient déclarés contre lui, et ils l’eussent fait sans doute tôt ou tard à l’instigation de Ricimer ; mais heureusement pour Anthémius une guerre domestique vint à propos détourner ces barbares de la guerre étrangère. Il éclata entre leurs quatre rois, qu’on appelait vulgairement les tétrarques, une de ces divisions, si cruelles dans les familles royales des Barbares, qui ne s’apaisaient que par le meurtre des pères et l’extermination des enfans. On vit plus tard chez les Franks des exemples de cette haine de bêtes féroces entre proches parens ; on en voyait alors chez les Visigoths, qui passaient pour les plus civilisés des Germains, et dont le trône pourtant ne se transmettait plus que de fratricide à fratricide. La guerre de famille prit encore chez les Burgondes un plus haut degré d’atrocité ; les tétrarques s’assaillirent mutuellement, et leur lutte avec des vicissitudes diverses se prolongea pendant plus de dix ans, au milieu d’horreurs qui révoltaient les Barbares eux-mêmes. En 470, Chilpéric et Godomar, coalisés contre Gondebaud, le chassèrent de Lyon, sa résidence royale, et le forcèrent à se réfugier au-delà des Alpes avec quelques fidèles qui refusèrent de l’abandonner. Accompagné de sa petite troupe, Gondebaud se rendit près du patrice, dont il était le neveu, et aux côtés duquel nous le trouvons en 472. Les exilés burgondes grossirent le parti d’Anthémius de bras vigoureux et dévoués à sa personne.

Tandis que la paix rétablie par l’autorité personnelle d’Epiphane allait ainsi se minant elle-même, une révolution importante s’accomplissait à Constantinople. Cette révolution, par ses rapports d’analogie avec ce qui se passait alors en Occident, mit toute l’Italie en émoi, et parut ouvrir carrière d’un côté ou de l’autre à des événemens décisifs. L’influence très considérable de cette cause lointaine sur le dénoûment des affaires occidentales me met dans la nécessité de m’y arrêter quelques instans ; j’en exposerai l’origine, la marche, les accidens divers aussi clairement et en aussi peu de mots que je pourrai.

J’ai déjà parlé d’Aspar, cet Alain, premier patrice de la Romanie orientale, dont les conseils firent échouer en 469 l’expédition d’Afrique : son mauvais vouloir contre Léon ne se borna pas là. Fils d’un Ardabure déjà tout-puissant au temps de Théodose II, il avait reçu de son père le pouvoir qu’il exerçait, et il voulait le transmettre à ses enfans ; c’était comme une dynastie barbare placée à côté du trône électif de Constantinople, et destinée à le dominer. Au moment où Marcien mourut, Aspar, maître des troupes, les fit pencher pour la candidature de Léon, et celui-ci reconnut qu’il devait en grande partie à sa protection le trône impérial ; mais le protecteur ne prétendait point rendre un service gratuit, et Léon s’était engagé, sous la foi du serment, à nommer césar un des fils du patrice, si lui-