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générations ou par règnes, que les historiens modernes ont considérés comme des intervalles de trente-cinq ou de quarante ans à peu près. De plus, certaines époques sont remplies d’événemens compliqués, d’autres sont vides, et les contradictions sont telles que, sur le temps où vécut Lycurgue, les hypothèses d’Aristote et d’Eratosthènes diffèrent d’un siècle entier. De même que certains personnages réels sont omis, d’autres, qui ont séduit l’imagination, sont multipliés. Ainsi l’Ariane d’Osiris se retrouve longtemps après dans les bras de Thésée. Newton tenta de mettre un peu d’ordre dans ce chaos, et calcula plus exactement la durée des règnes, qu’il était inexact d’identifier à la durée des générations, contrairement aux résultats de l’histoire moderne, car la durée d’une génération est de trente-trois ans, la durée moyenne d’un règne est de dix-huit ou vingt ans. Il ne fit remonter le commencement de l’histoire profane (il se tait sur l’histoire sacrée) qu’à l’an 1145 avant Jésus-Christ. À partir de cette époque, Newton donna les dates de tous les événemens historiques importans, et crut ne s’être jamais trompé de plus de vingt ans, rarement de cinq ou dix ans. Les détails sont infinis, ils annoncent une parfaite connaissance de l’histoire jusque dans ses parties les plus arides, une étude approfondie des lois, des progrès, des décadences de la civilisation. Les citations sont multipliées et ingénieusement appliquées. Tout cela pourtant n’assurerait pas au système l’exactitude à laquelle il prétend, sans les considérations astronomiques. On sait que la terre, outre sa rotation annuelle, a encore une révolution, plutôt soupçonnée que connue jusqu’à Newton. Ses pôles ont un mouvement très lent de rétrogradation d’orient en occident, qui fait que chaque jour leur position ne répond pas exactement au même point du ciel. En d’autres termes, les points du ciel où l’on aperçoit le centre du soleil, ou les points équinoxiaux, varient. Ce mouvement est d’environ cinquante secondes dans une année, d’où il suit que l’intervalle du temps écoulé entre un équinoxe et le retour de ce même équinoxe dans la révolution de la terre, intervalle que l’on appelle l’année tropique, est de quelques minutes plus court que l’année périodique, c’est-à-dire le temps qui sépare le moment où la terre part d’un point pour faire sa révolution annuelle et celui où elle revient à ce même point. C’est le phénomène de la précession des équinoxes. Cette précession, étant de cinquante secondes par année, c’est-à-dire presque insensible, augmente avec le temps, et elle est d’un degré, ou de la 360e partie du ciel, en soixante-douze ans. Par les observations des anciens astronomes, on peut savoir à quel point du ciel paraissait être le soleil à une époque donnée, et s’il paraît aujourd’hui être éloigné de ce point d’un certain nombre de degrés, il se sera passé depuis cette époque le même nombre de fois