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On a pu voir avec quelle rigueur les établissemens placés sous le contrôle de la compagnie sont maintenus dans les limites de l’éducation séculière, en dehors de toute tentative de propagande religieuse. Ce système exclusif, justifiable peut-être, est si strictement pratiqué, que l’on ne voit pas le corps nombreux des chapelains de la compagnie, qui semblerait appelé naturellement à diriger le mouvement chrétien et civilisateur dans ses domaines de l’Inde, prendre part aux travaux destinés à y propager la foi chrétienne et les lumières de l’Europe. Une seule institution relève de l’établissement ecclésiastique de la compagnie, c’est le Bishop’s Collège, dont l’étranger admire les splendides bâtimens en avant de Calcutta, sur la rive droite du Gange. Fondé en 1817, ce collège devait former parmi les natifs des prêcheurs catéchistes. Malheureusement, soit que le programme des études ait été mal formulé, soit tout autre motif, ce collège, presque entièrement délaissé, compte à peine douze élèves en moyenne, et c’est aux tentatives privées, aux efforts des sociétés évangéliques de l’Angleterre et de l’Amérique qu’est abandonné entièrement le soin de la propagande religieuse dans l’Inde. Vingt-deux sociétés évangéliques, anglaises, américaines ou allemandes, entretiennent des missionnaires dans l’Inde anglaise et fournissent le magnifique subside annuel de 187,000 livres sterling aux dépenses de la propagande chrétienne. Nous tirerons des comptes-rendus adressés en 1851 aux sociétés métropolitaines quelques chiffres qui peuvent servir à formuler les résultats des labeurs de l’apostolat évangélique.

L’état-major des missions protestantes dans l’Inde se compose de 853 missionnaires, savoir : 360 européens et 493 natifs. Les établissemens qu’ils dirigent se divisent en trois classes : les écoles où l’on enseigne les sciences modernes et la langue anglaise, situées surtout dans les grands centres de population ; des sortes d’hôpitaux où l’on accueille et élève les orphelins et les enfans pauvres ; enfin des écoles primaires où l’on enseigne la lecture, l’écriture et l’arithmétique dans la langue vulgaire du pays. Ces derniers établissemens, qui ont donné des résultats très remarquables, sont ainsi répartis : 127 dans la présidence du Bengale, 55 dans les provinces nord-ouest, 65 dans la présidence de Bombay, 852 dans la présidence de Madras, total 1,099 écoles fréquentées par une population de 74,000 élèves. Dans la présidence de Madras, où leurs travaux sont plus actifs que dans les autres divisions de l’empire indien, les missionnaires ont ouvert 229 écoles pour les filles, qui réunissent 6,929 élèves. Enfin les missionnaires protestans desservent 309 chapelles et administrent les secours spirituels à une communauté de plus de 103,000 âmes.

Faut-il accepter aveuglément ce dernier chiffre ? est-il moins gros d’illusions que ceux donnés par la correspondance des jésuites de la