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et en durée. La Carniole, la Carinthie, la Styrie, lui en offriront de moins bons, mais en quantités indéfinies. Ces provinces ne sont guère moins riches en bois de mâture qu’en bois de carénage : les pentes des Alpes carniques ne sont pas revêtues de forêts de sapins seulement; le pin y garnit d’immenses étendues, et il a pour voisin une espèce de mélèze qui, quoique moins serrée et moins élastique que celle des Alpes du Dauphiné, résiste suffisamment à la violence des coups de vent de l’Adriatique. Ces bois font déjà le principal tonnage d’exportation de Trieste : l’achèvement du chemin de fer de Vienne à l’Adriatique est à la veille d’en faciliter le transport, et il donne les plus fortes raisons de veiller à l’aménagement de richesses forestières qui doivent au voisinage de la mer une immense valeur. Les fers et les aciers de la Styrie et de la Carinthie prendront les mêmes voies que les bois pour arriver au même but. — Les chanvres d’Ancône sont recherchés pour leur nerf et leur durée dans tout le bassin de la Méditerranée : ils n’auront pas de débouché plus commode que l’arsenal de Pola.

Le combustible est fourni à la marine autrichienne par les houillères d’Angleterre et par celles de Sebenico, sur la côte de Dalmatie. Le charbon de celles-ci est des plus médiocres, mais elles sont à peine fouillées, et il n’y a point à désespérer d’y trouver des couches préférables à celles qui se sont présentées les premières à l’exploitation. Le réseau des lignes de fer qui doivent rattacher le territoire hongrois à l’Adriatique donnera d’ailleurs la possibilité de livrer en temps de guerre à la marine autrichienne des houilles supérieures à celles du littoral, et équivalentes à celles que lui refuserait l’Angleterre.

Aucune des positions maritimes de l’Europe n’est aussi favorisée que celle de Pola pour l’abondance et la qualité des vivres de bord, cette base de la vigueur et de la santé des équipages. Toutes les productions de la formation calcaire qui constitue le territoire de l’ancienne Illyrie sont remarquables par la fermeté de leur contexture et la persistance de leur saveur; cette double qualité est inestimable pour les voyages de long cours et la navigation sous le soleil du midi. Les vins de la côte, quoique fort mal fabriqués, se maintiennent parfaitement à la mer, et si le sol du littoral se refuse à la production de ces masses de beurre salé que l’Irlande et la Normandie livrent aux flottes de l’Angleterre et de la France, l’huile en tient lieu : le matelot dalmate ne connaît pas d’autre assaisonnement, et à défaut d’herbages, l’Istrie a des forêts d’oliviers. Les grains de la Hongrie, éminemment propres à la fabrication des farines d’armement, n’attendent que la soudure de quelques lignes de chemins de fer pour venir alimenter des minoteries construites sur les bords de l’Adriatique, et, si puissantes que deviennent ces usines, elles ne