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IV. — LE MESSAGE IMPÉRIAL.

(La pièce principale du harem.)

ERJEB-PACHA, LE CHEF DES EUNUQUES, PLUSIEURS ESCLAVES.


ERJEB-PACHA.

Que l’on aille quérir toutes mes femmes! Qu’on appelle aussi la Circassienne Adilé et ma sœur, (un esclave sort.) Oui, plus j’y réfléchis, plus je me sens porté à attribuer ce malheur à Satan. Le scélérat d’Albanais doit avoir employé des moyens diaboliques, des sortilèges, des charmes, comme ces damnés de chrétiens en possèdent seuls!... C’est le seul moyen d’expliquer mon aveuglement et le délire d’Ansha... Celle-ci mériterait peut-être quelque indulgence; mais non, l’indulgence serait d’un déplorable effet... Elles se diraient toutes ensorcelées... Hâtons-nous de punir. J’attends aujourd’hui le courrier de Stamboul, et je ne veux plus penser qu’aux grandes affaires... La lettre que j’écrivais à mon vénéré maître pour le remercier d’avoir donné un mudiriat à mon fils et accepté ma Circassienne..., cette lettre était conçue en termes qui ont dû toucher l’auguste padisha!... Il y a une phrase dont j’ai calculé les moindres mots! Allons, on reverra Erjeb-Pacha dans les conseils de sa hautesse... Mais voici ma sœur...


SCÈNE DEUXIÈME.
ERJEB-PACHA, LINDARAXA ET PLUSIEURS ESCLAVES.
LINDARAXA, avec embarras.

Pardon, mon frère, je vous ai fait attendre, mais je voulais...

ERJEB-PACHA.

Et où sont mes femmes ? Je les ai fait appeler.

LINDARAXA.

Je le sais bien, mais...

ERJEB-PACHA.

Mais quoi? qu’est-ce? parlez.

LINDARAXA.

Quant à Fatma...

ERJEB-PACHA.

Il n’est pas question de Fatma.

LINDARAXA.

Pardon, mon frère, mais il faut aussi que je vous parle d’elle. Fatma s’est retirée chez ses parens, et elle vous attend chez le kadi pour faire rompre votre mariage avec elle.

ERJEB-PACHA.

Fatma !

LINDARAXA.

Oui, mon frère. Elle ne se fût pas décidée d’elle-même à cette démarche. Votre fils... c’est-à-dire votre neveu...