Est-elle gaie? aime-t-elle à jouer et à courir?
Quant à la course, l’éducation qu’elle a reçue ne lui a pas permis de se livrer à ce genre d’exercice; mais son humeur est des plus enjouées, et le seul reproche que sa mère lui ait jamais adressé, c’est de trop aimer à jouer et à se divertir.
En ce cas, sa mère a tort. A quoi une femme de douze ans est-elle bonne, si ce n’est à jouer avec un mari de dix-sept? (avec brusquerie et d’un ton sérieux.) Mais après tout qu’est-ce que cela me fait? J’aime mieux ne pas me marier, ne pas être gouverneur, et rester tel que je suis.
Vous ne parlez pas sérieusement, Halil.
Pourquoi cela, père? Si j’ai jamais parlé sérieusement, c’est à présent, je vous le jure. Je suis heureux, j’ai ce qu’il me faut, je m’amuse... quelquefois... On m’aime, on a soin de moi... Qu’irais-je chercher ailleurs?
L’heureuse modération!
L’aimable simplicité de cœur !
Mais, Halil, que dirait sa hautesse, notre vénéré maître, si elle pouvait soupçonner le peu de cas que vous faites de ses bontés ?
Bah! qu’importe à sa hautesse? Elle a bien autre chose à faire qu’à s’occuper de moi. Et puis ne soyez pas en peine : son mudiriat ne lui restera pas sur les bras, et elle trouvera bien à le placer.
Mais c’est ce qui vous trompe, Halil; votre refus aurait une haute signification politique.
Bah!
Quant à votre mariage avec la fille de mon honorable ami, je ne vois pas ce que vous pouvez y trouver à redire.
Hum!
Au reste nous parlerons de tout cela en particulier. Je ne veux pas abuser des précieux loisirs de mes honorables amis.
Votre excellence n’a plus rien à nous ordonner?
Votre excellence nous permet de nous retirer?