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tachées d’irrégularité. Sur ces entrefaites, M. van Reenen renonçait à se présenter, et le parti libéral était obligé de chercher un autre candidat. Ce candidat a été M. Olivier, jurisconsulte et publiciste de Leyde, qui a échoué devant M. Groen van Prinsterer, et c’est ainsi que le chef du parti ultra-protestant rentre dans la chambre. Le nouveau ministère, disions-nous, s’est abstenu Jusqu’ici de toute manifestation politique significative ; mais en compensation il a adopté diverses mesures économiques. Il a nommé une commission pour examiner, au point de vue de l’intérêt hollandais, la question du percement de l’isthme de Suez. Il a décidé la concession de deux chemins de fer importans, l’un passant par les provinces du nord pour toucher au Hanovre, l’autre allant du port de Flessingue au Limbourg hollandais. Ces deux lignes, depuis longtemps en projet et même concédées à des compagnies qui n’ont pu réussir à les exécuter, complètent les communications de la Hollande avec l’Allemagne, et rentrent dans cet ordre de combinaisons propres à l’époque actuelle, où tous les peuples s’efforcent de multiplier et d’accélérer leurs relations.

Au nombre de tous les états du Nouveau-Monde périodiquement bouleversés par des révolutions dissolvantes, le Mexique occupe toujours à coup sûr le premier rang. C’est la plus grande des républiques hispano-américaines, et c’est la plus menacée, celle qui est le plus profondément atteinte dans toutes les sources de la vie. Elle ne peut se mouvoir sans faire un nouveau pas vers une catastrophe d’autant plus imminente qu’elle la prépare de ses propres mains. Aujourd’hui encore, un mouvement qui n’est qu’une sorte de tentative de dislocation vient d’éclater dans le nord du Mexique, sur la frontière des États-Unis. Un chef audacieux, don Santiago Vidaurri, gouverneur des états de Nuevo-Leon et de Coahuila, qu’il a réunis de son autorité privée, paraît s’être déclaré indépendant du gouvernement central de Mexico ; il s’est mis en insurrection ouverte contre le président Comonfort. Ce n’est là au surplus que le dénoûment facile à prévoir d’une lutte qui existait depuis assez longtemps, et qu’on ne peut guère comprendre, si on ne fait la part des divers élémens qui ont contribué à la révolution dans laquelle a disparu la dictature du général Santa-Anna. Lorsque cette révolution s’accomplissait, il y a un an maintenant, un assez grand nombre de chefs se trouvaient en présence pour se disputer la victoire. Les principaux étaient le général Alvarez, M. Comonfort, M. Antonio Haro y Tamariz, don Santiago Vidaurri. Chacun avait ses vues et ses ambitions. Quoique dépourvu de toute instruction et ayant presque toujours vécu parmi les Indiens de l’état de Guerrero, Alvarez avait le premier rang par le bénéfice de l’âge et parce qu’il avait avant tous les autres pris l’initiative de l’insurrection. Il fut nommé président par une sorte de junte réunie à Cuernavaca, près de Mexico. Ce vieil Indien cependant en eut bientôt assez de la vie civilisée ; ses hommes, accoutumés à la température du sud, grelottaient sous le climat de Mexico, et après avoir prélevé une contribution pour son armée