Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 5.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

efficaces et plus ou moins économiques; mais d’abord nous exposerons les idées reçues aujourd’hui sur la nature, le développement et les effets de la végétation parasite qui attaque la vigne, idées qui peuvent s’appliquer à des maladies analogues dont l’action s’exerce sur les pêchers, les houblons et les rosiers.

L’observation directe avait, dès l’origine, signalé la cause de l’affection spéciale de la vigne; c’était effectivement la végétation parasite développée dans les serres de Margate, et dont voici les caractères extérieurs et les propriétés. L’oïdium tuckeri, ou l’érysiphe de la vigne, attentivement observé et décrit par le révérend Berkeley, M. Le docteur Montagne, MM. Tulasne, Hugo-Mohl, le professeur Amici, Léveillé, Martins, Marès, et que j’ai pu étudier moi-même, est une des nombreuses plantes cryptogames dont le mode de fécondation est caché, comme leur nom l’indique, et dont les conditions de vitalité sont toutes différentes de celles qui conviennent aux végétaux phanérogames. Ces cryptogames utilisent, à la manière des animaux ou des radicelles et des fleurs des autres plantes, l’air qu’elles respirent, unissant l’oxygène atmosphérique à une partie du carbone qui se trouve dans leur nourriture, et dégageant ou exhalant le gaz acide carbonique produit par cette sorte de combustion lente, tandis que les feuilles et les autres parties vertes des plantes phanérogames, absorbant le gaz acide carbonique, fixent le carbone qui s’ajoute à leur substance et exhalent l’oxygène. C’est ainsi que s’entretiennent des forces qui se balancent dans les grandes harmonies de la nature, et que se maintient, avec beaucoup d’autres causes, la composition uniforme de l’atmosphère.

Le parasite de la vigne est un très petit champignon de la famille des mucédinées, à peine perceptible dans son ensemble, et même dans la réunion de plusieurs individus, sous l’apparence d’une légère efflorescence blanchâtre. Les séminules microscopiques sont, isolément, invisibles à l’œil nu. En observant sous le microscope la structure de l’oïdium, on reconnaît qu’il se compose de ce qu’on nomme un mycélium représentant les racines des autres plantes. Ce mycélium est formé de filamens très déliés, blanchâtres, qui rampent à la superficie du raisin, des feuilles et des sarmens, et y puisent la nourriture de la cryptogame dont ils font partie. Ces filamens translucides n’ont pas plus de 2 à 5 millièmes de millimètre de diamètre, un peu élargis aux points où ils forment des bifurcations. Ils portent à leur face inférieure des renflemens qui constituent des crampons ou suçoirs. De ces filamens partent des tigelles également blanchâtres et cylindriques, disposées perpendiculairement à la surface envahie par le mycélium. Les tigelles, longues de 6 à 15 millimètres, s’élargissent un peu vers le bout supérieur, où se forment graduellement les spores ou corpuscules reproducteurs