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terre ainsi affectée à son usage personnel, le villageois devrait à la propriété la mise en culture d’un terrain égal en superficie à celui qu’il aurait reçu pour son propre usage.

Afin d’épargner au villageois comme au propriétaire toute cause de mésintelligence ou de lésion dans le travail relatif au fermage de la terre, on s’entendrait pour qu’un tiers de la quotité de terrain allouée au villageois fût constitué en prairies, et le foin fauché par le villageois serait mis en meules soigneusement construites. Quant aux deux tiers restans, ils seraient ensemencés de la manière la plus utile et la plus conforme à la nature du terrain. — Le propriétaire serait tenu de fournir les instrumens, les animaux et les semences nécessaires au terrain exploité pour son compte, de sorte que le villageois n’aurait qu’à ensemencer, à faire la récolte et à en déposer le produit dans les magasins construits sur la propriété, avec tout le soin qu’exige l’économie rurale.

Ceux des villageois qui ne pourraient obtenir toute l’étendue du terrain demandé par eux, ou que d’autres motifs détermineraient à quitter la propriété qu’ils habitent, seraient libres de s’établir dans d’autres villages, après en avoir donné avis à l’autorité compétente, et réciproquement le propriétaire, au moyen de la même formalité, mais par voie judiciaire, aurait le droit d’éloigner de son domaine les villageois qui ne seraient pas nécessaires à son exploitation.

Dans le cas où les villageois établis sur le terrain d’autrui voudraient employer des animaux de labour à eux appartenant pour mettre en valeur le terrain qui fait le prix de fermage, il leur serait alloué deux pogones à titre de pâturage gratuit, sans que le propriétaire pût se prévaloir de cette concession pour exiger un surcroît de travail. Il donnerait de plus à chaque villageois un huitième de pogone dont la récolte serait emmagasinée dans le grenier de réserve pour assurer, en cas de disette, la subsistance de la communauté, ce qui serait tout à fait dans les traditions économiques des principautés.

Les conditions ci-dessus énoncées pourraient être considérées comme un projet, une esquisse de contrat normal entre les propriétaires et les villageois ; mais cette œuvre pour ainsi dire fondamentale devrait être précédée de résolutions législatives qui pourraient avoir à peu près le caractère suivant :

Toutes les dispositions qui règlent les droits et les devoirs des propriétaires et des cultivateurs les uns envers les autres seraient abolies. — Aucune obligation, à quelque titre que ce soit, ne pourrait désormais être imposée aux paysans qu’autant qu’elle serait librement et de gré à gré consentie entre eux et le propriétaire conformément aux principes qui régissent les contrats bilatéraux. — Les contrats de fermage que les cultivateurs habitant les villages ou les