Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/766

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trains omnibus soit dès à présent diminuée, c’est-à-dire qu’on imprime à ces derniers une marche plus active, et que le service ne soit pas organisé en vue d’accumuler les désagrémens pour le plus grand nombre des voyageurs ?

Du reste, quand on réserve ainsi à une minorité le bénéfice de la vitesse, ce n’est pas seulement l’esprit des règlemens qu’on offense, on en viole la lettre même. Tous les trains doivent contenir des voitures de toute classe, tel est le principe inscrit dans les règlemens. Il n’y a place que pour une exception, et encore ne peut-elle être faite qu’en vertu d’une autorisation spéciale. Il ne paraît pas douteux d’ailleurs que les compagnies s’abusent sur leur véritable intérêt. Elles trouveraient certainement des compensations à n’avoir que des trains contenant des voitures de toute classe. Plus elles se rapprocheront du principe de l’égalité, plus elles favoriseront l’uniformité de la circulation, et plus il leur sera facile de mesurer les nécessités du service. Cette méthode aurait en outre pour résultat d’augmenter le nombre des voyageurs, car en permettant de prendre les voitures de seconde classe, ou celles de troisième dans des cas où l’on est contraint aujourd’hui de prendre celles de première, elle équivaudrait à un certain adoucissement de prix. Ici cependant se présente une observation analogue à celle que nous a suggérée la question des tarifs : les compagnies aiment mieux un chiffre de bénéfices nets réalisés avec des trains express que le même chiffre recueilli avec des trains omnibus. Le dernier service est plus complexe et cause plus de peine.

Le public se préoccupe d’abus d’un autre genre, qui semblent l’affecter le plus sensiblement, des abus d’autorité, de procédés plus ou moins arbitraires qui se glissent dans les détails du service. Que des reproches de cette nature soient souvent entachés d’exagération, on doit le reconnaître. Les nécessités d’une tâche comme celle des chemins de fer commandent une grande indulgence. Le mot d’ordre ne saurait être observé en pareille matière avec trop de rigueur. Mille éventualités imprévues viennent à tout moment réclamer une action immédiate. Si large néanmoins que soit la réserve faite en faveur des agens des compagnies, elle a ses limites. Or il est incontestable qu’elles sont fréquemment dépassées. Des débats judiciaires n’ont-ils pas démontré, par exemple, que tantôt des employés s’arrogent le droit de se faire justice à eux-mêmes, tantôt qu’ils apportent dans les détails du service un sans-gêne plus ou moins regrettable? Ce sont là des exceptions, je le veux bien, mais des exceptions fâcheuses, et qui obligent à rappeler que l’expérience acquise par le personnel des chemins de fer a précisément pour objet de servir aux voyageurs qui n’en ont point, et qu’il faut que cette expérience impose ses prescriptions avec beaucoup de modération et de