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italique à la France et à l’Allemagne occidentale par une voie directe traversant la Suisse de Genève au Lac-Majeur, et s’ouvrant un passage à travers le Simplon. Moins avancée que l’Italie, du moins que l’Italie septentrionale, la péninsule ibérique aspire à sortir de sa longue inaction. Certaines lignes, concédées ou mises à l’étude, sont appelées à remplir un rôle international : telles les lignes de Madrid vers la France, soit par Burgos et Bayonne, soit par Saragosse et Tarbes, soit par Barcelone et Perpignan; telle encore la ligne vers Badajoz, sur les frontières du Portugal. Ainsi le réveil est général dans le midi de l’Europe. Il faut espérer qu’il en sera bientôt de même dans ces vastes régions de l’est, restées jusqu’ici en dehors de l’arène. Dans l’état actuel des choses, la Russie ne fournit aucun contingent au faisceau européen, car la ligne de Saint-Pétersbourg à Moscou ne deviendra une ligne internationale que le jour où la ville de Pierre le Grand sera mise en rapport avec les chemins germaniques. Les raisons qui appellent la Russie vers ce rapprochement sont trop évidentes pour que cette puissance tarde à se mettre à l’œuvre. Il en est aussi de très fortes pour l’empire ottoman, que de nouveaux liens viennent de souder à l’Europe. On peut attendre de la Turquie des concessions qui placeront le Bosphore au bout de nos voies ferrées.

Tel qu’il est au commencement de l’année 1856, le réseau continental ne comprend pas moins de 25,000 kilomètres en exploitation. Dans ce total, c’est l’Allemagne qui possède la plus grosse part : elle compte en effet plus de 10,000 kilomètres; la France en a un peu moins de 6,000; le surplus se divise entre tous les autres états[1].

L’arène commune ouverte aux nations transporte désormais leurs vieilles rivalités sur un terrain nouveau. Les rivalités propres à notre temps ont plus d’importance que n’en eurent jamais les luttes des siècles antérieurs. L’intérêt évident de chaque peuple est donc de tirer le meilleur parti possible de ses chemins de fer. Ceci nous amène tout naturellement à examiner le régime d’exploitation adopté dans notre pays.

  1. Malgré la différence signalée dans l’étendue des chemins, la France, où les lignes sont plus systématiquement ordonnées que dans les pays allemands, est au moins aussi bien desservie qu’eux par les voies existantes. Outre que l’Allemagne proprement dite est d’un cinquième plus vaste que la France, il s’y rencontre des nécessités particulières, dérivant du fractionnement du territoire en un grand nombre d’états, et qui obligent les chemins de fer à de fréquens circuits. — Si aux 25,000 kilomètres de notre continent on ajoute 13,000 kilomètres pour l’Angleterre, 33,000 kilomètres pour les États-Unis et 6,000 kilomètres pour les colonies anglaises de l’Amérique, pour le chemin de Panama et divers tronçons dans l’Amérique méridionale, dans l’Inde anglaise, etc., on arrive pour le monde entier à un total d’environ 77,000 kilomètres.