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naturels. En aucune partie de cette vaste région, l’on ne peut, dans une mesure suffisante, compter sur les pluies pour la culture du sol. La terre est dépouillée d’arbres, et sur de grandes étendues il n’y a aucune sorte de végétation. Quelques faibles rivières descendent en différentes directions des hautes montagnes qui en maints endroits traversent cette région. Ces rivières sont séparées quelquefois par des plaines et quelquefois par des montagnes sans eau ni végétation, véritables déserts, puisqu’on n’y trouve rien de ce qui peut servir à entretenir la vie animale. La culture du sol est donc limitée à ces étroites bandes de terre qui suivent le niveau des eaux, et partout où l’on voit une communauté s’y livrer avec quelque succès et sur une certaine étendue, elle implique un degré de subordination, une obéissance absolue à un maître, qui répugnent aux habitudes de notre peuple….. Les profits sont trop faibles pour que le travail servile puisse y devenir avantageux. L’esclavage, tel que les Mexicains l’ont mis en pratique, sous une forme qui permet au maître d’employer les services de l’homme aussitôt qu’il est adulte, — sans subir l’obligation de l’élever dans l’enfance, de le faire vivre pendant la vieillesse, d’adopter sa famille, — ne peut pas fournir de données exactes pour apprécier quels bénéfices on pourrait attendre du travail servile comme on l’entend aux États-Unis. Une personne qui visiterait ces régions et serait familiarisée avec le caractère et la valeur du travail servile aux États-Unis ne songerait jamais à amener ici des esclaves, encore moins à en acheter pour les y transporter. Leur travail ne rembourserait jamais le prix de transport et moins encore le prix d’achat. »

L’examen impartial de tous les travaux de reconnaissance faits dans ces parties nouvellement explorées de l’Amérique n’est point favorable aux conclusions des rapports officiels soumis au congrès. Au reste les officiers qui les ont rédigés, et qui concluent en faveur de la ligne du 32e degré de latitude, ont eux-mêmes compris que jamais on n’attirerait sur ce parcours une population nombreuse. Ils ont dû présenter un projet spécial d’organisation des postes appelés à entretenir et à défendre la ligne contre les Indiens. Ils semblent avoir renoncé volontairement à l’espérance de diriger sur ces parties centrales du continent américain un courant d’émigration destiné à relier par une chaîne continue les États-Unis de l’est aux provinces qui bordent le Pacifique. Il ne s’agit plus dès-lors de donner à la production et à la population américaines une faculté d’extension en quelque sorte sans limites : le chemin de fer du Pacifique n’est plus qu’une ligne servant à unir deux points séparés par des déserts. Même à ne le considérer que sous le point de vue technique, nous croyons que le tracé du 32e degré est inférieur aux tracés