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traversa le désert qui sépare ce fleuve de la Chaîne de la Côte et du Pacifique. Un grand nombre d’autres officiers américains publièrent de même le journal de leurs marches et de leurs reconnaissances dans le Nouveau-Mexique, et les nombreux renseignemens qu’ils ont rassemblés sur cet immense territoire ont pris une valeur toute nouvelle depuis que les officiers du bureau topographique, chargé d’examiner les divers projets du chemin de fer du Pacifique, donnent une préférence marquée à la ligne du 32e degré de latitude, qui traverse une partie du Texas et le Nouveau-Mexique tout entier. Quand on réfléchit à l’intérêt qu’auraient les partisans de l’esclavage à faire adopter ce dernier tracé, on ne peut s’empêcher de croire que la préférence dont on trouve l’expression dans tous les rapports officiels n’a pas été uniquement déterminée par des considérations topographiques et techniques; mais comme celles-ci sont les seules qu’on ose mettre en avant pour agir sur l’opinion publique, il importe de les apprécier. Dans l’examen de la valeur relative des traités étudiés, nous aurons donc recours aux indications précieuses répandues dans les rapports des divers officiers qui ont visité, à l’occasion de la guerre, le grand territoire du Nouveau-Mexique et la Californie.

C’est en 1853 que le congrès américain ordonna d’étudier plusieurs routes situées à diverses latitudes et traversant toute l’étendue du continent américain jusqu’à l’Océan-Pacifique. Nous suivrons, en les examinant, l’ordre topographique, en commençant par le nord et finissant par le sud. La première route s’étend à peu près sur le 47e degré de latitude. Le parti chargé d’étudier cette route était commandé par M. Stevens, gouverneur du territoire de Washington[1]. Il visita, avec le concours de plusieurs officiers américains, le territoire du Minnesota, les vallées du Missouri et de ses tributaires, les points par où l’on peut franchir les Montagnes-Rocheuses et les branches principales de la Colombie.

On comprend aisément quels seraient les avantages d’une ligne qui suivrait ce parcours. Partant des grands lacs, qui sont le centre d’une immense navigation intérieure, elle s’appuierait partout sur des voies navigables. Faire un chemin de fer en quelque sorte de toutes pièces dans des solitudes, sur une longueur de sept cents lieues, est une tentative folle, si les régions où il doit passer ne présentent point les ressources et les facilités qui attirent ordinairement l’émigration, et parmi lesquelles on peut ranger en première ligne les grands cours d’eau navigables. Il est bien nécessaire de comprendre qu’une entreprise semblable ne peut réussir qu’à la

  1. L’ancien territoire de l’Orégon a été divisé en deux parties : l’Orégon proprement dit et le territoire de Washington; ces deux provinces sont séparées sur une assez grande longueur par le cours même de la Colombie.