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leur donner des gages de dévouement, et se proposa pour conduire l’avant-garde de l’expédition. Sir John le loua beaucoup de cette résolution, car il était toujours disposé à soutenir les folies les plus téméraires, et le surlendemain Maxime partit avec quatre hommes sur un caboteur qui devait le jeter en Toscane.

Maxime ne s’était pas trompé : rien n’était prêt pour un soulèvement, ni sur la côte, ni dans les montagnes. Tous les rapports lus dans les comités étaient mensongers; l’impéritie des meneurs éclatait dans tous ces plans de campagne, si bien conçus de loin. Pendant un mois, Maxime battit le pays à travers mille périls; deux de ses compagnons furent pris et fusillés. Après avoir joué vingt fois sa vie et sa liberté dans cette aventure, Maxime revint à Malte, et là il lui fallut subir une sorte de jugement. On l’accusa positivement de trahison. Il repoussa avec hauteur ces accusations ridicules, et, dédaignant de se justifier, il rompit brusquement avec les réfugiés de Malte.

Au moment de s’embarquer, il rencontra Ferletti sur le port. Ce Ferletti était un de ceux qu’il méprisait le plus pour ses discours emphatiques, ses airs de prophète et sa profonde hypocrisie. — Vous avez été trop vif, lui dit gracieusement le conspirateur; mais je vous comprends et je leur ferai entendre raison. Il faut les ménager; avec cette vile canaille, nous ferons de grandes choses. Comptez sur moi. Je suis heureux de vous avoir rencontré; je vous cherchais. — Et moi je vous fuis. — Sans rancune, dit Ferletti; nous nous retrouverons un jour. — Jamais, ni vous ni les vôtres, dit Maxime en le repoussant. Il parlait en toute sincérité. Ce métier ténébreux de conspirateur lui répugnait. Sa nature élégante et fière se révoltait contre cette vie de mystères, de mensonges et de basses intrigues qu’il avait traversée. Toute cette fausse activité lui faisait horreur. Aux turbulens proscrits de Malte il opposait les inertes paysans lombards. Conspirer ou obéir, n’y avait-il donc point d’autre alternative pour l’Italie? Et la réponse à cette question, Maxime osait à peine se la faire, car il se surprenait à désespérer de son pays. Une épreuve commençait pour lui, épreuve délicate et terrible, qui allait durer autant que sa vie. Maxime avait jusqu’alors aimé l’Italie d’un amour ardent et profond. Cet amour se changeait tout à coup en un dégoût amer, c’était presque le sentiment de la patrie qui venait de s’éteindre en lui; mais comment le remplacer? comment se créer une patrie nouvelle?

Maxime revint à Saint-Alban dans une telle lassitude de corps et d’esprit, qu’il ne demandait plus que le repos, le calme à tout prix. Cette grande paix si désirée, il la trouva pleinement dans sa nouvelle famille. On le traita avec une extrême courtoisie, et tout