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LE
COMTE MOLLIEN

I.
LES FINANCES D’UNE MONARCHIE AU DÉCLIN
ET LES FINANCES D’UN RÉGIME NOUVEAU.


Ce n’est pas moi qui jamais aurai la pensée d’abaisser la révolution française et les temps qui l’ont suivie : j’admire la période historique qui commence à 1789, je la trouve profondément empreinte de fécondité et de majesté ; mais il est impossible d’étendre jusqu’aux caractères individuels de la plupart des acteurs qui ont eu les grands rôles l’admiration qu’inspire ce drame immense. Au milieu de tant de changemens, dans ces renversemens inopinés et ces résurrections plus imprévues, presque tous les personnages politiques, cédant à la force des choses et plus encore à leur propre ambition, ont mis un empressement déplorable à répéter indéfiniment la manœuvre de brûler ce qu’on a adoré pour adorer ce qu’on a brûlé. Parmi tant d’hommes à conviction flottante qu’on a vus cherchant sans cesse le fil de l’eau à travers les événemens, dans cet enchaînement de palinodies choquantes quand ce ne sont pas des trahisons détestables, l’œil aime à se reposer sur quelques-uns, qui sont restés fidèles à eux-mêmes sans s’isoler du siècle, et qui ont su rendre des services distingués à la chose publique sans jamais ternir leur caractère par des violences ou par des bassesses. À leur aspect, l’observateur jaloux de la dignité humaine éprouve une satisfaction comparable à