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de ce genre plus générale et plus complète. Le système d’affermage des revenus indirects a été aboli. Le gouvernement gère directement la régie des sels et des tabacs, et il y trouve déjà un avantage sensible. La banque romaine qui existait autrefois a été transformée et est devenue la banque des états pontificaux, qui a établi des succursales dans les provinces et agrandi le cercle de ses opérations. En un mot, il est certain que le gouvernement pontifical n’est point resté inactif pour le bien ; il a montré ce qu’on n’avait pas montré jusqu’à lui dans les États-Romains, le goût des améliorations sérieuses. S’il a des lenteurs, des incertitudes, s’il ne réussit pas toujours, cela tient à plusieurs causes dont l’une, la première, est la situation terrible où s’est trouvée la papauté.

C’est l’œuvre des puissances catholiques de fortifier le saint-siège contre ses lenteurs ou ses irrésolutions, de l’appuyer de leur concours dans ce travail de réparation et de pacification qui a été dès l’origine la politique généreuse de Pie IX. La sécularisation à un degré compatible avec le caractère de l’autorité pontificale, l’affermissement des institutions municipales, l’amélioration progressive du régime judiciaire, la transformation de la situation économique par la sévérité introduite et maintenue dans les finances et par le développement des intérêts généraux du pays, — tel est le terrain sur lequel l’Europe et la papauté peuvent se rencontrer. Il faut y joindre la formation de l’armée, qui doit hâter la fin de l’occupation étrangère. Chercher aujourd’hui à imposer autre chose au pape par une pression indéclinable, c’est livrer la place à la révolution, et la révolution, c’est l’ennemi pour l’Europe, c’est l’ennemi surtout pour l’Italie, qui saigne encore des blessures qu’elle en a reçues.

Si le saint-siège n’était point ce qu’il est, c’est-à-dire une puissance étendant son empire sur la conscience de millions d’hommes dans les différens pays, si le souverain des états pontificaux n’était pas en même temps le chef de l’église, on se préoccuperait moins de la sécurité et des destinées de son pouvoir, du calme ou de l’agitation des populations romaines ; mais il y a une cause supérieure en jeu : il est impossible de ne point songer aux périls qui naîtraient d’un ébranlement nouveau, à ce que pourrait coûter à l’Europe toute tentative pour modifier l’existence de la papauté temporelle. Les passions religieuses, se mêlant aux passions politiques, pourraient devenir la source de terribles et sanglans conflits. C’est ce qui explique le rôle que la question romaine et les affaires d’Italie ont joué dans le congrès de Paris. De là aussi la préoccupation actuelle des cabinets. Il y a ici cependant une distinction à faire : toutes les puissances ne sont point également intéressées dans la question, elles ne sont point placées au même point de vue et dans les mêmes conditions.