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se replier sur lui-même, comme un élastique de bretelle, au moindre choc, au moindre ébranlement.

Dans cet état, notre infusoire se multiplie aussi bien par division spontanée que par bourgeons, qui apparaissent à la base de l’urne, et, selon les espèces, se groupent en bouquet autour de la vorticelle mère, ou bien se détachent et vont se fixer au loin. Il paraît se reproduire en outre par plusieurs autres procédés. D’après Stein, la vorticelle, après avoir vécu quelque temps dans cet état, se replierait en quelque sorte sur elle-même, reprendrait la forme d’une sphère, émettrait de nouveau des rayons, en un mot repasserait à l’état d’acinète. Dans son intérieur, on distinguerait une sorte de noyau[1] qui, jouant le rôle de bourgeon interne, grandirait, s’organiserait et deviendrait un jour vorticelle. Celle-ci, une fois complètement développée, romprait le corps de l’acinète, qui n’en continuerait pas moins à vivre, reproduirait un autre noyau qui, à son tour, deviendrait une autre vorticelle, et ainsi de suite. Tel serait, d’après Stein, le mode ordinaire de multiplication de ces jolis infusoires ; mais il arriverait aussi parfois que le noyau se fractionnerait en un nombre considérable de nucléoles très petits, qui deviendraient autant de centres d’organisation, et on verrait alors s’échapper de l’acinète mère, non pas une seule vorticelle, mais trente ou quarante monades (monas colpoda ou scintillans), destinées sans doute à recommencer ce cercle de transformations et de multiplications à peu près indéfinies.

Ainsi, d’après Stein, les vorticelles qu’il a étudiées posséderaient indépendamment de la fissiparité et de la germination externe, deux autres modes de multiplication. À en croire M. Pineau, dont les observations paraissent aussi précises que celles du professeur de Tharaud, on trouverait dans ce même groupe un cinquième moyen de reproduction. Selon lui, certaines vorticelles bien caractérisées s’enkisteraient, comme nous l’avons dit plus haut, et perdraient bientôt leur pédicule. Alors l’animal subirait une franche métamorphose et deviendrait un oxytrique, infusoire depuis long temps connu, assez semblable à une navette, portant sur les côtés des bandes de cils vibratiles très fins, tandis qu’en avant et en arrière on trouve une courte rangée de soies grosses et raides. Sous cette

  1. Ce noyau (nucleus) existe chez un très grand nombre d’infusoires, mais non pas chez tous, comme semblent le croire quelques naturalistes. Il parait jouer un rôle très important dans tous les phénomènes qui se rattachent à la division spontanée. Je ne l’ai pas trouvé chez les espèces les plus manifestement élevées en organisation. Peut-être pourra-t-il servir d’indice précieux, en ce que sa présence suffirait pour caractériser une larve, tandis que son absence annoncerait la présence, sinon d’un infusoire parfait, au moins d’un animal très avancé dans la voie de ses transformations.