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présentée, celle des énormes moutons du Holstein, dont les brebis n’ont pas moins de quatre agneaux, ce qui ouvre à l’art des éleveurs une série nouvelle et inattendue d’expériences. Il serait imprudent de se prononcer d’avance ; mais, si cette heureuse fécondité peut se maintenir sur un point, quelconque de notre sol, sans entraîner de trop, grands, frais d’alimentation, cette conquête suffirait pour payer les frais de l’exposition.

Les, animaux de l’espèce bovine venus du centre de l’Europe étaient curieux sans doute, mais, sans aucun profit pour nous ; nous avons aussi bien ou mieux. J’ai peine à croire que les bœufs hongrois, avec leurs cornes extravagantes, soient bons à quelque chose. Les hommes qui les accompagnent portent un costume oriental, fort peu commode pour le travail. L’aspect des uns et des autres explique bien des choses. Les buffles n’ont quelque utilité que dans des régions chaudes et humides, qui ne se rencontrent que bien rarement sur le continent européen. Les moutons des steppes hongroises ont beaucoup frappé par leur rusticité on dit que cette race est excellente laitière, et qu’elle donne de bonne viande d’agneau ; sa laine grossière et feutrée sert à faire le manteau national. La collection des mérinos autrichiens et saxons était admirable. Ces troupeaux sont aussi puissans par le nombre que par la qualité ; le prince Esterhazy ne possède pas moins de 160,000 têtes ; d’autres en ont 30,000, 20,000, 10,000. Le mouton est là, comme en Écosse, à peu près l’unique habitant de vastes solitudes qui, sans lui, seraient tout à fait désertes. Il n’en sera probablement pas toujours ainsi ; les moutons feront venir les hommes, mais pour le moment c’est le pays du monde le plus propre à la production économique de la laine fine : il peut en fournir toute l’Europe.

Nos races nationales d’animaux domestiques pourraient donner lieu à une foule d’observations. La matière est si immense et si complexe, qu’on ne doit pas l’aborder sans la traiter à fond. Tout ce qu’on peut dire en gros, c’est que la race charolaise a maintenu sa supériorité pour l’engraissement précoce, la flamande pour le lait, la normande pour la double aptitude du lait et de la viande, la bretonne pour la grâce, et la sobriété ; les durham font de plus en plus des progrès en Anjou ; les Anglais eux-mêmes ont admiré les types que nous possédons, et qui sont pour la plupart nés en France. Pour les moutons, c’est toujours la grande création nationale de Rambouillet qui tient la tête, avec les sous-races de Mauchamp, d’Alfort et de Trappes pour annexes ; celle de la Charmoise se soutient, et paraît bien décidément fixée. Cependant qu’il y a encore loin de là à une exhibition véritablement nationale ! La moitié méridionale de la France manque toujours presque complètement ; ce n’est pas une douzaine d’animaux,