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LITTÉRATURE DRAMATIQUE

La Bourse
comédie de M. Ponsard.


Le sujet choisi par M. Ponsard est un sujet difficile. Ce n’est pas là sans doute une hardiesse qui mérite le nom de témérité ; mais pour l’accomplissement d’une pareille tâche, il faut quelque chose de plus qu’une versification élégante et des tirades bien faites : la satire la plus vive ne suffit pas. Il est absolument nécessaire de placer le rire à côté de l’émotion, et la comédie de l’Honneur et l’Argent, malgré le succès qu’elle a obtenu, n’a pas prouvé que l’auteur fût doué de facultés comiques. L’intention est excellente, je me hâte de le reconnaître. Il est certain pour tous les esprits clairvoyans que la fureur de la spéculation a singulièrement contribué à la corruption des mœurs. C’est une vérité que personne ne songe plus à remettre en question, et tôt ou tard la poésie devait s’en emparer pour la rendre populaire et tenter de démontrer à sa manière que le jeu envahit de jour en jour les couches les plus profondes de la société moderne, qu’il ébranle la moralité des familles, et met la richesse au-dessus de tous les devoirs. Cependant, quand je parle de démonstration, je n’entends pas attribuer à la comédie une mission didactique. Si elle manie des argumens au lieu de mettre en scène des personnages, si elle disserte au lieu de dérouler sous nos yeux une action vivante et rapide, il est évident qu’elle se trompe. C’est la précisément ce qu’on pouvait, ce qu’on devait reprocher à la comédie de l’Honneur et l’Argent. Cette première tentative, qui a réuni tant de suffrages parmi ceux qui aiment les vers bien faits,