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aux fonds qu’il a employés dans les placemens qui présentent des différences à recueillir. Les données exactes nous manquent pour estimer par des chiffres approximatifs la somme qui a été appliquée à ces opérations, et les évolutions qu’elle a pu accomplir de l’achat à la vente. Le compte de profits et pertes ne fournit pas non plus les lumières qu’il donnait les années précédentes sur les résultats de ces opérations. Dans ce compte, pour les exercices précédens, les bénéfices sur émissions d’actions et d’obligations, rémunération des services de crédit commanditaire rendus par la société générale, formaient un article distinct, et les intérêts et bénéfices de placemens, résultat des opérations de vente et d’achat des valeurs, formaient un autre article. Ces deux articles sont englobés en un seul dans le compte de profits et pertes de 1855, et parmi les 26 millions de profits qui y sont portés, il nous est impossible de distinguer, comme nous l’avons fait pour les exercices précédens, la part qui revient aux services commanditaires, et celle qui résulte du simple trafic des valeurs. Tout autorise à penser que cette dernière part, ainsi confondue dans un total commun, a dû être beaucoup plus considérable que dans les deux premières années.

Les opérations dont nous venons de nous occuper donnent matière à des observations qui nous paraissent confirmer la répugnance que nous exprimions tout à l’heure pour l’intervention active d’une société anonyme dans le commerce des valeurs.

Il est d’abord évident que ces opérations ne sont justifiées par aucun résultat d’utilité publique et générale. Lorsque le Comptoir d’es compte et la Banque de France transforment les sommes dont ils disposent en effets de commerce escomptés, et que ces sommes étant redevenues disponibles par l’échéance et l’encaissement des effets, ils les réengagent de la même façon, en multipliant ces évolutions de leurs fonds, le Comptoir d’escompte et la Banque de France secondent puissamment l’accroissement de valeur que le commerce et l’industrie donnent aux marchandises, et impriment une activité féconde aux rapports de la production avec la consommation ; mais, en remplissant son portefeuille de titres et en le vidant tour à tour, le Crédit mobilier n’ajoute rien à la valeur intrinsèque des capitaux que ces titres représentent : il fait une œuvre complètement stérile au point de vue de l’utilité générale. Ces opérations n’ont de résultat utile que pour ses actionnaires, au profit desquels il recueille des différences, différences prélevées sur les besoins ou les erreurs des détenteurs de titres ou de capitaux et des spéculateurs. — Mais ces opérations, disent ceux qui en soutiennent la légitimité, sont dans le droit commun, les titres mobiliers qui représentent les fonds publics et les valeurs créées par la commandite étant faits pour