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plus célèbres naturalistes allemands, Carus, comme résultant de ses recherches sur les helminthes ou vers intestinaux, inaugurent une ère toute nouvelle dans l’histoire du développement des êtres. Ces pionniers de la science ont ouvert une voie où nous marchons d’un pas chaque jour plus ferme, mais dans laquelle on a maintes fois failli s’égarer. L’histoire complète de ces tâtonnemens, présenterait un intérêt réel, mais elle serait beaucoup trop longue et difficile, à suivre. Nous devons donc nous borner à jalonner pour ainsi dire la route tracée par les premiers qui abordèrent cette terre inconnue[1] ; encore serons-nous parfois obligé d’intervertir l’ordre chronologique, afin de présenter d’abord les résultats qui, par leur netteté et leur précision, pourront servir de type. À ce titre, les travaux de MM. Saars et Charles de Siebold sur la reproduction des méduses doivent incontestablement passer les premiers.

Rappelons d’abord quelques faits bien connus de tous les naturalistes, mais, peu familiers pour être à la plupart de nos lecteurs.

Depuis près d’un demi-siècle, les zoologistes ont admis entre au très grandes divisions de l’embranchement des rayonnés, la classe des acalèphes et celle des polypes. Cette distinction semblait plus que justifiée. On a en effet constaté entre les deux groupes des différences bien plus profondes et plus nombreuses que celles qui séparent les reptiles et les oiseaux. Aspect extérieur, organisation intérieure, rien ici ne se ressemble. Tous les acalèphes sont libres et nageurs ; la plupart sont solitaires ; à peine quelques polypes au contraire jouissent-ils de mouvemens obscurs de reptation ; presque tous sont fixés à demeure, et l’immense majorité vit en colonies. L’hydre de Trembley sert de type, nous l’avons vu, à ce dernier groupe, elle est restée le chef de file d’un ordre tout entier. Les méduses appartiennent au premier. J’ai plus d’une fois déjà entretenu les lecteurs de la Revue de ces singuliers zoophytes, qui parfois couvrent la mer de leurs essaims et échouent par bancs sur la plage. On les reconnaît aisément à leur ombrelle en forme de champignon ou de cloche, tantôt incolore et transparente, tantôt opaline et richement teintée à la façon des émaux. Cette ombrelle est à la fois le corps et l’organe locomoteur de l’animal. Dans son épaisseur sont cachées les cavités digestives, les canaux circulatoires ; ses contractions rhythmiques servent à la natation. Au centre de la face concave, là où serait placé le pied du champignon ou le battant de la cloche on trouve la bouche, entourée presque toujours de divers appendices. Enfin le bord même de l’ombrelle est souvent garni de cirrhes, parfois très

  1. Expression employée en 1835 par un naturaliste allemand, M. de Siebold, qui désignait en particulier l’histoire de la reproduction des helminthes.