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très agiles, qui se fixent plus tard et deviennent l’origine d’une colonie nouvelle[1]. Cette importante observation, d’abord niée, puis confirmée par divers naturalistes, devint pour M. Edwards seul le point de départ de recherches plus approfondies que nous allons exposer sommairement[2].

Les ascidies sont des mollusques marins sans coquilles, dont les nombreuses espèces peuvent être partagées en trois groupés : chez les uns, les individus vivent isolés, et on les appelle alors ascidies simples ; chez d’autres, ils sont lâchement réunis les uns aux autres par des prolongemens en forme de racines traçantes, et on les désigne sous le nom d’ascidies sociales ; chez d’autres enfin, les individus sont entièrement ensevelis dans une masse commune, ont entre eux des relations organiques étroites, dispositions qui justifient l’expression d’ascidies composées. Les premières se présentent d’ordinaire sous la forme de masses irrégulièrement globuleuses adhérentes aux corps sous-marins ; les secondes pendent presque toujours à la voûte de quelque rocher creux comme autant de petites girandoles de cristal ; les troisièmes tapissent parfois des roches entières, des pierres, des fucus. D’ordinaire la masse commune est comme gélatineuse, à demi transparente, plus ou moins teintée de rose, de vert ou de brun, et chaque colonie dessine à sa surface tantôt des festons irréguliers, tantôt des figures qu’on dirait tracées par le compas d’un géomètre. Chez toutes les ascidies d’ailleurs l’organisation est au fond la même. Toutes ont un système nerveux très simple, un appareil circulatoire très imparfait, un tube digestif plus ou moins contourné, et chez un grand nombre on peut étudier ces détails à la simple loupe sans recourir au scalpel, grâce à l’extrême transparence des couches tégumentaires.

L’œuf pondu par une ascidie composée s’organise rapidement, en présentant les phénomènes dont nous avons parlé au début de cette étude. Comme chez la hermelle et le taret, il se change en larve de toutes pièces ; cette larve à corps ovalaire est munie d’une longue queue qui lui donne quelque ressemblance avec un têtard. Aucun viscère n’existe encore ; seulement une sorte de tégument très épais, incolore et transparent enveloppe une masse centrale, homogène, d’un jaune foncé, où se développeront les divers organes. Un

  1. Résumé des Recherches sur les animaux sans vertèbres faites aux îles Chausey, 1828.
  2. Observations sur les ascidies composées des côtes de la Manche en 1834 et 1839. Ce travail a été imprimé par l’Académie des Sciences en 1841. Depuis, M. van Bénéden a étendu aux ascidies simples les résultats obtenus par M. Edwards chez les ascidies composées et sociales. (Recherches sur l’Embryogénie, l’Anatomie et la Physiologie des ascidies simples, 1846.)