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vieilles règles qui, pris au mot, serait tout à la fois la négation du droit absolutiste et du droit parlementaire, c’est lui-même que l’histoire surprend à violer ces règles, et à la multiple sanction que donnaient à la légitimité de dom Pedro le droit d’aînesse, le bon plaisir du royal testateur, la volonté légalement exprimée du pays, la reconnaissance de tous les gouvernemens réguliers de l’Europe, enfin sept déclarations écrites et deux sermens solennels de l’usurpateur, vient s’ajouter, vérification faite l’autorité des précédens.

On comprend qu’aucun antagonisme réel et durable ne pouvait germer sur ce vide. Quand le sort des armes eut réconcilié la force avec le droit, et que les innombrables intérêts dont l’infant rebelle, en sa qualité de régent, tenait le fil au moment de son usurpation furent rendus à leur libre arbitre, l’amnistie générale accordée par dom Pedro n’eut donc guère à prêcher que des convertis. Le miguélisme a bien pu se glisser une dernière fois sur la scène lors des troubles de 1846, mais par un subterfuge qui équivalait à un aveu d’impuissance. L’administration Costa Cabral venait de décréter un recensement tendant à régulariser la répartition de l’impôt et d’interdire les inhumations dans les églises, mesures d’une incontestable utilité et fort inoffensives à coup sûr, mais que l’opposition d’alors imagina de dénoncer, l’une comme l’avant-coureur d’un impôt de capitation, l’autre comme une interdiction de la sépulture religieuse. Les septembristes, qui ne passaient pas précisément pour dévots, crièrent bien fort à l’irréligion, ce qu’entendant, les miguélistes, qu’on ne supposait pas si libéraux, crièrent non moins fort à la tyrannie. Dans je ne sais plus quelle localité, à Braga, je crois, le premier mort porté au nouveau cimetière fut exhumé par les femmes du peuple et rapporté triomphalement à l’église au bruit du tocsin que sonnait une des émeutières. Le prénom Maria et le nom Fonte étant fort répandus en Portugal, on les donna plaisamment à celle-ci, et le mouvement, qui prit un caractère assez sérieux pour motiver l’intervention de la quadruple alliance, s’appela la révolution de Maria da Fonte. La lithographie, la complainte, la légende, exploitèrent sous toutes les faces ce Jacques Bonhomme femelle. — Ici Maria da Fonte, le sabre au poing et la giberne aux reins, faisait honte aux chrétiens de l’autre sexe de souffrir qu’on les enterrât comme un vil bétail ; — là elle tenait bravement tête au collecteur, qui venait imposer non-seulement la maison et le champ, mais encore la cruche, la quenouille, les jupes et jusqu’aux cheveux de la Mafia da Fonte. Bien que le miguélisme, par ses affinités avec la population rurale, eût fini par se trouver placé de fait à la tête de cette singulière agitation, il n’osa pas même arborer franchement son drapeau, acceptant jusqu’au bout l’alliance et, qui plus est, la