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succès. Grâce à lui, la photographie avait une pratique certaine, un ensemble de lois clairement défini. Aussi ne songea-t-on d’abord qu’à se conformer strictement aux prescriptions de Daguerre et à opérer suivant la méthode qu’il avait imaginée. Un peu plus tard, on essaya de compléter le progrès en changeant le champ de l’opération Quelques-unes des anciennes tentatives furent reprises et poursuivies avec le secours de l’expérience actuelle ; mais ces efforts pour obtenir sur le papier des images exactes restèrent longtemps assez infructueux, et vers la fin de 1848, à l’époque même où la Revue résumait l’histoire des premiers travaux accomplis, on pouvait dire avec raison que, « sous le rapport de l’art, les produits de la photographie sur papier étaient infiniment au-dessous des planches daguerriennes. » — Les choses ont bien changé depuis lors. Des perfectionnemens successifs, la découverte ou la combinaison de nouvelles substances ont eu raison de certaines difficultés qui semblaient au début presque insurmontables, et le problème de la reproduction sur papier a si bien trouvé sa solution, que les procédés de Daguerre, c’est-à-dire les reproductions sur plaques métalliques, sont aujourd’hui à peu près hors d’emploi. Il n’est pas jusqu’au mot photographie qui n’ait perdu sa valeur primitive et sa signification générale. L’usage en a limité le sens depuis que les recherches mêmes se sont concentrées sur un seul point : au lieu d’exprimer l’art de fixer par l’action chimique de la lumière l’image des objets extérieurs, il n’exprime plus qu’un des modes d’application de cet art inauguré par Daguerre. Qui dit photographie veut dire maintenant photographie sur papier, et nous rappelons le fait afin d’être autorisé à prendre ici ce terme générique dans son acception un peu détournée.

Les reproductions photographiques exigent, on le sait, deux opérations successives. La première a pour résultat l’image inverse ou négative du modèle transcrit au moyen de la chambre noire, c’est-à-dire qu’on voit d’abord se dessiner sur l’épreuve d’où sortiront les épreuves définitives une sorte de silhouette dans laquelle les ombres réelles sont traduites par des blancs et les lumières par une teinte obscure, le tout en vertu des propriétés de la couche sensible étendue à l’avance sur cette première épreuve. La seconde opération consiste dans l’exposition à l’action directe de la lumière solaire d’une feuille de papier introduite sous l’image négative déjà obtenue. Cette feuille, ainsi placée et préalablement imprégnée de substances sensibles domine l’image qui la recouvre, subit à son tour et à travers celle-ci la décomposition chimique provoquée par l’agent lumineux ; mais elle la subit tout différemment, du moins quant à l’effet pittoresque. Les parties blanches dans le négatif ayant livré passage aux