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ner l’Écosse ni constamment ni de près. La séparation de la dynastie et de la nation ne se fit pourtant pas sans déchirement. Tantôt la vieille fidélité des clans royalistes s’arma pour maintenir ou rétablir les anciennes formes de l’autorité ; tantôt la royauté dans son ambition d’arbitraire s’efforça de retenir ou d’entraver l’essor de l’indépendance nationale et de ramener la religion locale à l’uniformité anglicane. L’Écosse avait vu partir ses rois, sans cesser d’avoir un gouvernement à elle, et ce gouvernement, suivant l’esprit qui régnait dans le pays, était tour à tour un moyen de résistance que les Stuarts voulaient vaincre et l’instrument d’une autorité dont ils voulaient user. Pendant tout le temps qui s’écoula de l’avènement de Charles Ier à la grande année 1688, le pays, agité tant par ses troubles intérieurs que par le contre-coup des mouvemens de l’Angleterre, passa par toutes les épreuves d’une contrée en révolution, quoiqu’il n’eût plus une politique entièrement indépendante et ne fît plus lui-même ses destinées. Heureusement la réformation y avait produit ce que peut-être elle n’a nulle part ailleurs réussi à créer aussi complètement, une église vraiment populaire. Le presbytérianisme est une démocratie de pasteurs élus, pour un grand nombre, par leurs troupeaux, ou du moins indépendans par leur origine, soit du gouvernement civil, soit même du gouvernement ecclésiastique. Cette forme religieuse devint dominante en Écosse, et son empire ne fut troublé que par l’effort des sectes rivales, jusqu’au jour où la sagesse de Guillaume III, osant s’élever cette fois au-dessus des préjugés anglicans, reconnut, constitua et dota l’église nationale, cette kirke souvent raillée en Angleterre, et dont l’existence officielle au sein du royaume-uni fut un premier échec à l’orgueil épiscopal, et demeura l’espérance de tous les dissidens.

Les parlemens locaux subsistaient, mais ces institutions ne plongeaient pas dans le sol des racines bien profondes. Les élections n’étaient pas sérieusement populaires. Les traditions constitutionnelles n’avaient pas la puissance naturelle qu’elles ont acquise en Angleterre. Les assemblées réduites, ou peu s’en fallait, au rang d’états provinciaux, n’avaient plus la chance de devenir le siège du gouvernement, et quoique agitées souvent par les dissidences ou les passions, elles avaient cessé de pouvoir être redoutables, sans cesser d’être quelquefois embarrassantes. Enfin vint le jour de la réunion, les deux chambres allèrent se fondre dans celles de Westminster. La vanité écossaise, les ambitions de quelques familles purent en souffrir ; des opinions qui subsistaient au-delà du Tweed, mais qui ne dominaient pas à Londres, purent se soulever quelquefois contre une fusion qui peu à peu les mettait à néant, et elles furent pour quelque chose dans les mouvemens tentés pour la cause des Stuarts en 1715 et en 1745. Le jacobitisme, le catholicisme,