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commerce, c’est en activer la circulation, et c’est seconder du même coup la multiplication des produits et des échanges, c’est augmenter la puissance reproductive du capital de roulement de l’industrie et du commerce, c’est encourager le développement du travail. S’il est de l’essence de l’effet de commerce de circuler, comme le capital que la production et la consommation se renvoient de l’une à l’autre, il est au contraire de la nature du titre de rente ou des valeurs industrielles, dans une situation normale, de rester dans les mêmes mains. Chaque circulation de produit qui donne naissance à un effet de commerce ajoute au produit une façon, un service nouveau, et en augmente la valeur réelle. Qu’un titre de rente ou une action change dix fois, cent fois de propriétaire, cette circulation n’ajoute rien à la valeur réelle du capital que représente le titre; aussi dit-on de ces valeurs, avec une satisfaction légitime, qu’elles sont classées lorsqu’elles sont arrivées aux mains des capitalistes qui doivent les garder comme un placement fixe et se contenter d’en toucher les revenus. Faciliter par le prêt sur dépôt la circulation des titres, ce n’est donc plus, comme par l’escompte commercial, imprimer une activité plus grande au capital de roulement de l’industrie, féconder le travail, concourir à l’accroissement continu de la richesse générale : c’est tout simplement venir au secours du détenteur besoigneux de ces valeurs, ou, ce qui serait plus fâcheux, encourager le spéculateur qui les prend un moment sans avoir l’intention de les garder, uniquement dans l’espoir de les revendre avec bénéfice.

Telle est la différence qui sépare l’escompte du prêt sur dépôt de titres; elle est si profonde, qu’il semblerait au premier abord que les opérations de prêt sur nantissement de titres fussent incompatibles avec la mission des établissemens qui doivent au crédit commercial toutes leurs ressources. Il y a cependant des circonstances où il est désirable que le détenteur besoigneux du titre soit aidé et que le spéculateur lui-même soit encouragé. Les titres de rentes représentent le crédit de l’état; les actions ou obligations de chemins de fer représentent des entreprises éminemment utiles à l’industrie et au commerce, et qui procurent à la circulation active des produits, des ressources matérielles analogues au concours moral que lui prête le crédit. Fournir aux porteurs de rentes et d’actions de chemins de fer des facilités qui leur permettent de rendre momentanément disponible le capital qu’ils ont engagé en rentes et en actions, c’est soutenir la confiance des capitaux que l’on veut attirer dans les emprunts ou associer à la construction des chemins de fer. De pareilles facilités ont surtout ce caractère aux époques d’émission d’emprunts publics et de création des compagnies, lorsqu’il importe de donner aux titres de rente et aux actions le temps de se classer et de