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Ce fut pour échapper à cette incertitude du crédit individuel et parer à son insuffisance que l’on imagina de placer la dispensation du crédit commercial sous la garantie d’un intérêt collectif, et que l’on créa des banques publiques d’escompte et de circulation.

L’intervention des gouvernemens dans la création des banques a quelquefois compliqué la constitution de ces établissemens, en vue de certains intérêts politiques, d’attributions et de servitudes qui ne sont point inhérentes à leur nature. C’est ce que l’on observe notamment à l’origine de la Banque d’Angleterre, la première banque d’escompte et de circulation qui depuis a servi de modèle à tant d’institutions de ce genre. Mais ces superfétations parasites ne changent rien aux lois de leur destination commerciale. Avant 1848, lorsque la France n’était point encore placée sous le régime d’une banque unique, on a pu voir comment et à quelle fin des banques indépendantes s’établissaient dans nos principales villes de commerce. Les banques naissent naturellement de l’association des industriels et des négocians d’une place commerciale qui forment leur capital par souscription d’actions. Elles ont pour mission d’escompter les effets de commerce de la place ou des places comprises dans le cercle de leur action; elles sont appelées à y entretenir un réservoir de crédit constant, accessible à tous, à des conditions modérées et égales pour tous. Par elles, on assure la permanence du crédit; au lieu d’avoir uniquement affaire aux disposeurs individuels avec leurs ressources, leurs exigences, leurs caprices variables, le banquier est désormais certain de rencontrer dans la banque un disposeur tenu de mettre ses ressources collectives au service de l’intérêt commun, un disposeur auquel il pourra toujours réescompter les effets qu’il aura lui-même escomptés au commerçant. On obtient par là non-seulement la régularité, mais le bon marché du crédit. Les banques créées par les capitaux associés de leur propre clientèle, en vue d’un intérêt général à satisfaire, n’ont pas à poursuivre les bénéfices l’ardeur des intérêts individuels. Il doit leur suffire de régler leurs escomptes à un taux qui couvre d’une part comme une prime d’assurance le risque de non-remboursement attaché aux effets, et de l’autre procure à leur capital un revenu égal aux profits les plus modérés qu’obtiennent les capitaux dans le commerce. Ainsi l’abondance du crédit toujours maintenue au niveau de ses besoins, sa régularité, sa fixité, son bon marché, voilà ce que l’on cherche dans la création des banques. Par quels moyens les banques atteignent-elles ces objets?

La première de leurs ressources est leur capital. Si c’était la seule, les banques seraient incapables de faire face aux besoins du crédit commercial, leur industrie ne serait pas rémunératrice du