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les sucreries et quelques autres industries annexées aux exploitations rurales. Les appareils perfectionnés et les procédés qui réalisent ces utiles applications se sont produits en grand nombre à l’exposition universelle de 1855. Il nous reste à exposer les plus remarquables parmi ces innovations agricoles et manufacturières.


II.

D’irrécusables témoignages attestent les remarquables progrès que l’agriculture a réalisés en vue de développer la production alimentaire. Il suffit de rappeler l’accroissement considérable de la consommation des subsistances, de celles surtout qui caractérisent une civilisation plus avancée, qui élèvent la force et la durée moyenne de la vie parmi les populations. Ne voit-on pas jusqu’en 89 l’agriculture de la France, sur une égale superficie, nourrir avec peine et d’une manière parcimonieuse 24 millions d’habitans consommant chacun bien moins de pain de froment et de viande que chaque individu de la population actuelle du même pays, qui atteint aujourd’hui le chiffre de 36 millions et s’est accrue de 50 pour 100 ? On peut donc admettre que la production à cet égard est au moins doublée. Autrefois d’ailleurs le plus grand nombre des habitans des campagnes, des villages, et même des villes de second ordre, ne pouvaient prétendre à obtenir des viandes fraîches après la Saint-Martin et jusqu’à Pâques, car durant cet intervalle de temps les pâturages manquaient, et l’agriculture négligeait les moyens connus de les remplacer. Ignorant d’ailleurs les procédés bien plus efficaces mis en lumière depuis lors, elle s’estimait heureuse que les habitudes des populations lui permissent d’attendre le retour des saisons favorables pour ranimer simultanément la vie et la reproduction dans les étables et dans les champs, et il fallait, afin de traverser la saison hivernale, se résoudre à faire des approvisionnemens toujours incomplets, toujours sujets à quelques altérations. Vers la Toussaint, on s’occupait de préparer les salaisons des viandes de porc et d’animaux des espèces bovines ; encore était-on obligé de ménager ces provisions insuffisantes, en observant avec une rigueur, inutile désormais, les prescriptions très sages alors qui décidaient le plus grand nombre à s’interdire deux jours de chaque semaine, ainsi qu’en temps de vigile, d’avent et de carême, l’usage de la viande comme moyen d’alimentation.

L’agriculture progressive de nos jours trouve au contraire dans l’accroissement de consommation des substances alimentaires sa principale garantie contre l’avilissement des prix de ses récoltes, et sans avoir à craindre maintenant le reproche inconsidéré qu’un