Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/153

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cela me passe. » Mme Fox lui prit la main en pleurant. « Je suis heureux, lui dit-il, je suis plein de confiance, et je puis dire plein de certitude. » Fitzpatrick, miss Fox, une nièce qu’il chérissait, lord Holland qu’il traitait comme son fils, ne le quittaient point dans ses derniers jours. On raconte qu’il vit aussi lord Henry Petty, et qu’il M dit : « Tout ceci est dans le cours de la nature ; je suis heureux ; vôtre tâche est difficile, ne désespérez pas. » L’avant-veille de son dernier jour, M. demanda à lord Holland s’il n’y avait plus d’espoir. Lord Holland ne le trompa point ; Fox lui serra la main. Quand un jeune ecclésiastique, M. Bouverie, vint lui lire les prières, il écouta avec le plus grand calme et se tut. Pendant les dernières luttes, ses yeux se portaient avec tendresse sur tous ceux qui l’entouraient ; mais quand il regardait sa femme, ses yeux exprimaient la tendresse et la compassion. Il paraissait inquiet de la laisser faible et isolée. « Je meurs heureux, » telles furent ses dernières paroles ; puis ses regards se fixèrent plusieurs fois sur sa femme, il la nomma et fît effort pour prononcer des mots qu’on ne put entendre. Il mourut à Ghiswick, le 13 septembre 1806, à six heures vingt minutes du soir.

On a fait connaître son testament, qui ne contient que des marques de souvenir à ses amis et quelques dispositions pour assurer le sort de sa veuve On dit qu’il voulait être enterré à Chertsey, près de Samt-Ann’s hill ; mais il fut décidé que de solennelles funérailles lui étaient dues. Elles furent célébrées avec pompe, et son tombeau est à l’abbaye de Westminster.

Nos efforts auraient bien mal répondu à notre pensée, si ce qu’on vient de lire n’avait un peu fait voir combien Fox était digne d’être aimé. On a contesté plusieurs de ses qualités, blâmé sa conduite, critiqué ses vues. On lui a donné de grandes louanges et bien diverses, mais au-dessus des critiques et même des éloges un aveu unanime s’élève : il était bon. C’était une de ces natures instinctivement honnêtes et généreuses que l’esprit de parti lui-même ne réussit point à haïr. En Angleterre aujourd’hui, tous les partis ne parlent de lui qu’avec un bienveillant respect, et sa mémoire est aimée.

Deux ans après sa mort, son histoire de la première partie du règne de Jacques II fut publiée par les soins de lord Holland. Cet ouvrage, qui n’est pas achevé, devait être un tableau de la révolution qui a fondé sous sa forme définitive la liberté de l’Angleterre. Fox attachait le plus grand prix à son travail. Quoique souvent interrompu, il le poursuivit pendant plusieurs années avec plus d’ardeur que de continuité. Il était conduit par deux sentimens qu’il voulait allier et qui ne sont point incompatibles, l’amour de sa cause et l’amour de la vérité. Il travaillait lentement et se défiait de ses habitudes de tribune. « Je viens de finir mon introduction, écrit-il