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Gerson et de Bossuet n’était plus : avec le gallicanisme s’étaient enfuies les vertus et les lumières.

Ce fut un immense malheur pour la révolution. Tandis que le gallicanisme civil n’avait cessé de s’accroître, les traditions de la liberté ecclésiastique, reniées par le haut clergé, ne vivaient plus que dans quelques ordres religieux, dans une partie des professeurs et des curés. L’ultramontanisme avait tout ravagé. On n’a pas assez tenu compte aux législateurs de la première révolution des obstacles que leur suscita la décadence de l’église gallicane. Ils eurent la pensée patriotique et chrétienne de réaliser aussi le gallicanisme religieux, les vœux et les espérances de la nation leur en faisaient un devoir ; mais ils trouvèrent trop peu de secours au dedans de l’église. Leur zèle et leurs travaux n’en sont pas moins dignes de reconnaissance. Les faits se développent, les résultats parlent, et le temps est venu d’apprécier plus équitablement la constitution civile du clergé. Cette œuvre, si violemment décriée comme une nouveauté profane, n’est en réalité, dans ses principales dispositions, qu’un perpétuel emprunt aux coutumes les plus anciennes et les plus autorisées de l’église ; aussi elle restera, malgré ses défauts, comme le plus vigoureux effort pour rendre au catholicisme, avec sa première forme, son antique splendeur. Elle fut sur le point de conclure le concordat de la religion et de la civilisation. Ici encore, 89 ne brille-t-il pas comme le phare lumineux du progrès ?

Nous savons tous les préjugés, toutes les répulsions que réveille dans le clergé le nom seul de l’église constitutionnelle. Il n’a pas dépendu de l’ultramontanisme de défigurer et de flétrir autant que possible cette restauration si remarquable du régime primitif de l’église. Il savait que la défaveur dont il la frappait ne pouvait manquer de rejaillir sur les principes du gallicanisme. Qu’on nous permette, dans l’intérêt de ces mêmes principes, d’opposer au préjugé et à la passion l’irrécusable autorité des actes et des momumens historiques. Ils prouvent que, dans sa courte existence, l’église constitutionnelle déploya une puissante énergie, soit pour se délivrer des élémens impurs qui d’abord s’étaient introduits dans son sein, soit pour résister aux persécutions du dehors. À l’origine, elle se recruta parmi deux classes d’hommes bien différentes. Les esprits légers, les prêtres sans mœurs, honteuse écume de l’ancien régime, avaient saisi avidement une liberté où ils rêvaient la licence et l’oubli de leurs devoirs. À cette classe appartiennent les prêtres et les évêques mariés et apostats. — Le nombre au reste en fut moins considérable qu’on ne le croit communément. — Le nouveau régime fut souillé de cette plaie, il ne l’avait pas produite ; mais à côté de ces ministres indignes, qu’elle se hâta de répudier et de flétrir, l’église constitutionnelle