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non ibis amplius. Les travaux n’auraient jamais pu franchir une certaine profondeur, si l’on n’eût inventé des moyens pour assécher les mines. Ces moyens furent d’abord très simples : on se débarrassait des eaux à l’aide de manèges et de galeries d’écoulement. Enfin la puissance mécanique vint au secours de l’industrie houillère. Ce fut vers 1720 que la première machine de Newcomen (pompe à feu) fut montée aux environs de Liège. De cette époque date une activité nouvelle : l’impulsion était donnée. Aujourd’hui le système du Cornwall s’est substitué aux premières machines, qui n’existent plus guère qu’à l’état de monumens historiques. La pompe de Mariemont va chercher les eaux à 260 mètres, dans les vastes réservoirs destinés à les rassembler, et extrait 2,600 litres par minute. Il existe en Angleterre des machines d’épuisement qui représentent la force de 600 chevaux, et rien n’annonce que ce levier de l’industrie humaine doive s’arrêter là. Il en est du progrès mécanique comme de l’horizon, c’est une limite qui recule toujours. Quand on parcourt, sur une certaine échelle, les houillères en exploitation depuis longues années, il vous arrive plus d’une fois de rencontrer, à côté des nouvelles machines si hardies, si puissantes, si bien constituées, les anciennes machines. Ces dernières sont les embryons de la force et du mouvement, les dépouilles du progrès économique. A côté des fossiles de la nature, vous avez alors sous les yeux les fossiles de l’industrie.

Une autre difficulté non moins grande que l’écoulement des eaux a été l’aérification de la mine. On a d’abord eu recours aux ventilateurs qu’indiquaient le bon sens et la nature des lieux : la plupart des grandes mines arrivent à la lumière par six, huit ou dix puits, vastes tubes d’air, quelquefois même par des galeries ouvertes sur des vallées basses et encaissées. Pour activer l’effet de ces orifices et pour débarrasser les houillères des gaz impurs qui s’y accumulent, on a inventé les foyers d’aérage. Une partie du charbon qu’on extrait se brûle sur place pour assainir la mine. L’étroit passage dans lequel vous cheminez s’illumine tout à coup d’une clarté rougeâtre : vous vous trouvez en présence d’une fournaise ardente, véritable buisson de feu qu’un revêtement de brique isole des couches de houille. Ce foyer souterrain, destiné à rendre l’air plus léger en le dilatant, chasse au jour la fumée du charbon et les vapeurs impures de la mine par un vaste puits quadrangulaire, sorte de cheminée cyclopéenne qu’on prendrait volontiers pour le séjour de quelque esprit mélancolique, d’un sombre Umbriel qui vole au centre de la terre sur des ailes couvertes de suie, et auquel, selon l’expression du poète anglais, il a été interdit de ternir par sa présence la face radieuse de la lumière. Un tel mode de ventilation n’est point applicable à toutes