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propriétés optiques que notre sujet ne nous permet point d’aborder.

Nous voici à l’améthyste, dont le nom signifie spécifique contre l’ivresse. C’est un véritable cristal de roche coloré en beau violet; c’est essentiellement une pierre de jour qui perd beaucoup à la lumière. On peut dire qu’il ne manque à cette belle pierre que la rareté. Pline emploie le mot améthystiser comme synonyme de violétiser, tant les idées de violet et d’améthyste étaient analogues ! Les savans modernes, avec leurs yeux de lynx, ont cependant pu trouver une petite différence entre le cristal de roche violet et l’améthyste. Cette dernière est caractérisée par une série de petites couches ondulées que n’a pas le cristal de roche violet. Il existe aussi des cristaux de roche incolores ou jaunâtres qui offrent la structure ondulée intérieure de l’améthyste. J’ai retrouvé cette disposition par couches dans de la glace formée au rejaillissement d’une fontaine publique. Lorsque certaines agates possèdent de ces couches bien minces et bien uniformes d’épaisseur, elles prennent de belles couleurs d’arc-en-ciel, et on leur donne le nom d’agates irisées. Quelques détails échappés aux anciens auteurs peuvent faire présumer que les vases myrrhins, dont la valeur se comptait par centaines de mille francs, étaient quelquefois taillés dans des agates irisées. Sir David Brewster a donné la théorie exacte de ces irisations, ignorant que je l’avais donnée avant lui dans les comptes-rendus de l’Institut : sa théorie a donc été confirmée sitôt qu’elle a paru. Le même savant a fait voir d’une façon péremptoire que les riches couleurs des coquilles marines ne sont dues qu’à la forme de leur surface, qui est striée et ondulée par lignes très serrées; car, si l’on prend sur une cire noire très fine l’empreinte de la coquille colorée, on peut remarquer que la cire en adopte les couleurs en même temps qu’elle en adopte la forme. J’ai déjà dit que les élytres, ou fourreau des insectes, qui brillent des plus riches teintes, ne les devaient qu’aux raies que la nature a tracées à leur surface, et cela est démontré par l’empreinte sur la cire noire, qui devient colorée par cela seul qu’elle se moule sur les stries, qui sont la cause de la couleur. Les vases myrrhins étaient vendus 70, 100 et 300 talens. Or le talent était environ de 5,540 francs!

Nous pourrions aller chercher parmi les minéraux des pierres qui, étant taillées, feraient d’assez belles gemmes. L’euclase serait une émeraude faible en couleur, mais bien plus dure que la véritable émeraude. L’amphigène serait aussi beau que le saphir blanc. La prehnite du cap de Bonne-Espérance donnerait un vert céladon assez agréable. C’est une chose curieuse que les progrès de la minéralogie n’aient pas amené sur le marché des gemmes de nouvelle espèce propres à faire des parures. Ceci nous ramène à une belle idée de M. de Humboldt : c’est que la nature minérale est la même d’un bout à l’autre du monde, ce qui n’a pas lieu pour la nature végétale ni